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Elections régionales: entretien avec Philippe Meirieu, tête de la liste Europe Ecologie

1-Quelle a été la mesure pour laquelle vous avez voté qui a vous a paru la plus importante lors du dernier mandat ?


Vous savez je n’ai pas participé à la précédente mandature, mais le groupe des Verts qui participe activement à la dynamique du rassemblement. Et c’est grâce aux élus Verts que la majorité a adopté une délibération importante en juillet 2004 par laquelle le Conseil régional a décidé de faire entrer les principes du développement durable dans toutes les politiques régionales. A partir de cette délibération Les Verts ont poussé les politiques régionales à devenir à la fois plus solidaires, respectueuses de l’environnement et citoyennes. Progressivement, ils ont commencé à “changer le logiciel” régional, dans le sens de l’écologie. Il reste encore beaucoup à faire.


2-Quelle a été la mesure qui n’a pas été votée que vous auriez souhaitée ?


Les Verts auraient souhaité un vrai programme pour le foncier : acquérir des terrains pour le logement locatif, préserver les terres agricoles, protéger les espaces les plus naturels et les ressources fondamentales comme l’eau potable, créer des jardins en espace urbain, etc. Ils n’ont pas été entendus sur ce point, mais nous ne désespérons pas d’y parvenir bientôt avec une voix plus forte. C’est une nécessité si nous ne voulons pas que notre région soit livrée entièrement aux avidités du marché immobilier.


3-Quelles seront vos propositions en matière d’énergie, pour les économies et l’innovation ? Sachant que Rhône-Alpes est la région au monde qui concentre le plus d’installations nucléaires (plusieurs centrales, une usine de combustible, des réacteurs de recherche…) quelle est votre position sur cette forme d’énergie ?


Nous voulons une région 100% énergies renouvelables pour 2050. Pourquoi envisager 2050 alors que le mandat risque de durer seulement 4 ans ? Parce que la politique ne se pense pas à court terme, comme le font, de plus en plus nos politiques, à coup de réformes qui sont remplacées tous les ans par une nouvelle réforme. Cette manière de faire de la politique relève tout simplement de la communication politique, où l’on essaye de faire croire aux citoyens l’hyperactivité de leur gouvernant.


L’écologie politique a toujours pensé les problèmes de nos sociétés modernes sur le long terme. C’est pourquoi, depuis longtemps, nous avions anticipé la fin du pétrole, comme nous anticipons aujourd’hui la fin de l’uranium. Au-delà d’anticiper la raréfaction de nos ressources naturelles, nos propositions en matières d’énergie sont très innovantes, puisque nous souhaitons avant tout aller le plus possible vers l’autonomie énergétique des individus grâce aux économies d’énergie et au développement des énergies renouvelables. L’objectif est de faire baisser la facture énergétique des Rhônalpins et de sortir les plus démunis de la précarité énergétique. En même temps, notre politique se veut pragmatique puisque nous savons que la dépendance au nucléaire en France ne nous permet pas de sortir de jour au lendemain de cette source d’énergie.


Nous envisageons une sortie du nucléaire pour les vingt prochaines années. La sortie du nucléaire en Allemagne a notamment permis de créer 250 000 emplois dans les énergies renouvelables. Voilà l’économie de demain. C’est pourquoi dès le début du mandat, nous prévoyons entre autres de créer une société de services énergétiques, qui aura pour but de collecter des fonds auprès des citoyens, des entreprises et des institutions afin de faciliter le développement solidaire des économies d’énergies dans le secteur de l’urbanisme et du logement en Rhône-Alpes. Toutes nouvelles constructions et réhabilitations de logement sera fait selon des normes de haute qualité environnementale. Nous soutiendrons spécifiquement toutes les filières d’avenir : le bois, le solaire, l’éolien, la géothermie, etc.


4- Quelles seront vos actions en faveur de la science et de la technologie, sources de progrès, mais aussi de risque et d’interrogation, en matière d’énergie et d’environnement ?


On ne doit rien engager qui obère l’avenir et puisse compromettre notre bien commun, la planète, comme le développement harmonieux de chaque être humain. Donc nous appliquerons le principe de précaution, afin de limiter les expositions des salariés et des habitants de la région aux risques des nouvelles technologies dont nous ne maîtrisons pas tous les effets. C’est le cas des ondes électromagnétiques, des nanotechnologies ou des nouvelles pollutions chimiques. Regardez les dégâts de l’amiante ou des pesticides. Pensez-vous qu’il y aurait eu autant de victimes si nous avions appliqué le principe de précaution ? Einstein disait : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Donc en même temps, la science ne se résume pas aux nouvelles technologies. Nous soutiendrons activement la recherche dans l’éco toxicologie, la prévention sanitaire et environnementale, les sciences humaines en favorisant les coopérations interdisciplinaires et entre les établissements universitaires, les échanges avec des chercheurs étrangers, des bourses de mobilités et le doublement des allocations de recherche. Nous sommes très sensibles à la notion de progrès lorsque celle-ci s’accompagne du mot social. Notre principal objectif est d’encourager le progrès social, qui passe par les solidarités entre les individus, mais aussi par l’amélioration des conditions de travail et la santé au travail. Notre politique de prévention, de responsabilisation sociale et environnementale des entreprises doit nous permettre d’atteindre de progrès.



5- Quelle est votre position vis-à-vis des organismes génétiquement modifiés et des nanotechnologies?


Je crois que dans les deux cas, les études scientifiques ne permettent pas d’exclure à 100% les risques pour les citoyens. Donc notre position est claire : nous voulons une région sans OGM, et je crois que sous la précédente mandature, Les Verts ont réussi à faire accepter ce principe. Les OGM qui, au-delà de la question des risques, sont une catastrophe pour les pays du sud, notamment à cause du modèle économique agricole que les grandes firmes multinationales souhaitent imposer.


Les pays du sud doivent pouvoir développer une agriculture vivrière et c’est la première priorité que nous donnerons aux politiques de coopération internationale de la Région, qui représentera 1% du budget régional parce que c’est ça aussi la solidarité. Le principe de précaution devra s’appliquer aux nanotechnologies. D’ailleurs, les gens ne sont pas dupes quant aux dangers que peuvent représenter cette technologie de l’infiniment petit. Le débat national sur les nanotechnologies constamment annulé ou reporté par le ministère montre à quel point on essaye de ne pas écouter les citoyens et les experts.



6- Quelles actions proposez-vous en matière de transports collectifs ou en faveur des modes doux ? Quelle est votre position sur la liaison ferroviaire Lyon-Turin ? Sur le contournement ferroviaire fret de l’agglomération lyonnaise (CFAL) ? Sur le projet de nouvelle autoroute A45 entre Lyon et Saint-Etienne ?


La priorité de la mandature est de porter à quasiment 100% du budget des transports en faveur des investissements pour les transports collectifs, et en particulier les TER. Aujourd’hui, environ 20% du budget transport du conseil régional est encore consacré aux investissements routiers. L’objectif est d’essayer de mettre tous les rhônalpins à moins de 10 minutes d’une solution de transport collectif, ce qui passe par la réouverture de gares et de lignes de chemin de fer, notamment sur la rive droite du Rhône afin de faire revenir en Ardèche des trains voyageurs.


Alors oui, le bilan de la précédente mandature en matière de développement de l’offre TER est bon, mais nous irons plus loin. Les cars voyageurs TER viendront compléter l’offre de train là où ils sont jugés plus adéquats, une tarification sociale sera très largement développée, notamment pour les chômeurs, les jeunes et les personnes à mobilité réduite, le transport de marchandises sera considérablement réorienté vers le rail. Mais aller plus loin, ce n’est pas que poursuivre les recettes et solutions qui existent déjà. Il faudra innover et penser la mobilité de demain à travers les gares, qui pourront être transformées en pôle de multi modalité, avec une agence régionale du covoiturage, pour accompagner les rhônalpins dans les nouvelles mobilités du XXIème siècle. L’enjeu majeur est d’anticiper la raréfaction du pétrole qui coûtera de plus en plus cher. Et vraiment avec un budget transport qui pèse environ 25% du budget régional, la région Rhône-Alpes peut passer à la vitesse supérieure pour répondre efficacement aux crises écologiques, sociales et économiques. Mais passer à la vitesse supérieure n’est pas forcément l’allure à laquelle nous devons anticiper ces changements, c’est aussi penser efficacement le développement de notre région.


Nous programmons ainsi la réalisation de plus de 500 kms de voies vertes, en plus des 427 kms du Léman à la Mer Méditerranée. Des parkings vélos de 500 à 10 000 places seront implantés dans les gares de nos grandes agglomérations, sur le modèle de certaines villes du nord. Toutes ces nouvelles mesures s’inscrivent dans la poursuite de certains projets comme la liaison ferroviaire Lyon-Turin, qui dépend surtout d’une impulsion financière des gouvernements français et italiens. Enfin vous l’avez compris, nous préférons développer le transport ferroviaire entre Lyon et Saint-Etienne plutôt qu’un projet d’autoroute énergétivore, au coût exorbitant, qui ne respecte ni les populations ni l’environnement, ni le soi-disant moratoire du grenelle de l’environnement contre la construction de nouvelles autoroutes. Notre projet politique est véritablement tourné vers l’avenir des futures générations afin de préparer la société que nous laisserons à nos enfants.


7- Elevage, arboriculture, production de proximité, agriculture biologique ou moins polluante : quelles actions proposez- vous en matière de protection des agricultures régionales ?


Nous proposons d’appliquer à l’agriculture, comme dans tous les autres secteurs, les 3R : relocaliser la production, reconvertir les exploitations vers l’agriculture biologique et mieux redistribuer les subventions notamment en partenariat avec l’Union Européenne. Ce vaste chantier pourra s’appuyer sur plusieurs leviers : aide au développement des Associatios pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne (AMAP), à l’installation des jeunes agriculteurs, la mise en place de ceintures vertes autour des agglomérations, une diversification des cultures dans les exploitations, la protection des ressources, etc. La région Rhône-Alpes sera sans OGM, c’est déjà le cas aujourd’hui grâce aux Verts, mais aussi une région sans pesticides. Nous mettrons en place une grande concertation avec tous les citoyens et agriculteurs pour y parvenir.


8- Quelles propositions faites-vous en matière de protection des espaces naturels, de la biodiversité sur tous les points du territoire régional ?


Nous développerons de nombreuses actions : créer des corridors biologiques, des trames vertes et bleues, mise en place de ceintures vertes autour des agglomérations pour limiter l’étalement urbain, protéger nos ressources naturelles, lutter contre toutes les pollutions et développer une agriculture locale et biologique en favorisant les circuits courts. Ce sont surtout les pollutions qui détruisent le plus les espaces naturels. Il faudra faire respecter la mise en œuvre des plans de protection de l’atmosphère et promouvoir une agriculture sans pesticides. Un conservatoire des semences sera créé pour conserver le patrimoine et faciliter le retour de certaines cultures sur notre territoire. L’eau et les forêts sont des ressources dont la protection est prioritaire : pour l’eau, nous développerons les contrats de rivière, nous mettrons en place des incitations pour que les rhônalpins s’équipent de récupérateur d’eau et pour qu’ils fassent baisser leur consommation, etc. Pour les forêts, le plus important est de reconnaître et d’affirmer la valeur sociale de la forêt, en accélérant la création de zones forestières, en protégeant les forêts anciennes et surtout en développant une filière bois de qualité et durable à tous les niveaux de production (production, transformation, artisanat, construction, etc.).


Enfin, il faudra absolument s’appuyer sur les associations de protection de l’environnement présentes dans notre région. Il faut aussi les soutenir dans leur fonctionnement et non plus simplement sur projet. Elles représentent plus de 2 000 emplois salariés et elles constituent un important dispositif d’éducation à l’environnement. Nous seront attachés à l’éducation de tous, rhônalpins et touristes, au respect et à la connaissance des espaces naturels. Cela passera par des partenariats avec le monde universitaire, une éducation à l’environnement au lycée, développer des espaces pédagogiques et mettre en place des formations autour de l’éducation à l’environnement pour tous et tout au long de la vie.


8 bis- Rhône-Alpes compte déjà plusieurs parcs naturels régionaux (Pilat, Vercors, Bauges, Chartreuse, Jura – un bout dans l’Ain, Ardèche…) Etes-vous favorable à la création d’autres PNR rhônalpins ?


Nous sommes plus que favorables à la création de nouveaux PNR, en priorité un parc naturel pour les Dombes (Ain) et un pour les Baronnies (Drôme). D’autres seront étudiés. Certains pourront être agrandis. Enfin nous demanderons l’inscription du Mont Blanc au patrimoine mondial de l’humanité. Pour Europe écologie, les parcs naturels régionaux sont d’une importance majeure pour la préservation de la biodiversité, du patrimoine naturel et des traditions locales. Mais les PNR doivent s’inscrirent dans une démarche d’aménagement du territoire et de valorisation énergétique beaucoup plus large, comme par exemple interdire tous les engins motorisés dans les PNR (moto cross, quad, etc.). Surtout, ce patrimoine naturel doit être préservé avec la participation de tous les rhônalpins et des associations de protection de l’environnement. Il faudra créer une vraie instance régionale de participation citoyenne sur les questions environnementales. Ce patrimoine à protéger est aussi une chance pour nos territoires et le développement d’un tourisme responsable, local et solidaire. La démarche doit donc être globale en intégrant tous les niveaux de décision. Nous ferons en sorte que les politiques environnementales soient abordées de manière transversale au niveau du conseil régional. L’agriculture, le tourisme, le développement d’une économie sociale et solidaire, les transports, toutes les politiques doivent être pensées en lien avec l’environnement de l’homme. Encore une fois, il s’agit d’une chance. Et nous ne le rappelons jamais assez, mais l’enjeu du changement climatique guidera toutes les politiques que nous mènerons à la région.



9- Les finances publiques doivent être gérées de manière durable, avec un souci d’efficacité et d’évaluation. Quelle sera votre politique en matière fiscale, mais aussi en matière d’allocation de fonds publics ?


En matière fiscale, je crois qu’il faut avant tout pointer l’abandon des politiques de solidarité de l’Etat, notamment lorsque le gouvernement permet d’exempter de l’impôt les plus hauts revenus avec le bouclier fiscal, où lorsque celui-ci se prive de la TVA des restaurateurs à un moment où les finances de l’Etat exige de ne pas taxer toujours les mêmes, c’est-à-dire les classes moyennes. Il faut aussi dénoncer la tentative de recentralisation fiscale des régions à travers la suppression de la Taxe Professionnelle, qui va considérablement réduire les marges de manoeuvre de nos collectivités. D’ailleurs, de nombreux élus locaux, de droite comme de gauche dénoncent cette suppression de la TP. Sur ces questions nationales, nous souhaitons que les régions coopèrent pour affirmer un vrai rôle politique de contre pouvoir face à l’Etat sarkozyste. Alors que le Parti Socialiste a géré 20 régions sur 22 pendant 6 ans, avez-vous vu l’émergence d’un réel contre pouvoir ? Non, tout simplement parce que le logiciel politique des socialistes reste positionner sur la compétitivité des régions qui induit la compétition. Avec Europe écologie, nous passerons de la compétition des régions à la coopération régionale. Avec un budget de 2,4 milliards d’euros, la région Rhône-Alpes n’a pas beaucoup d’argent – environ 350 euros par rhônalpin et par an. C’est pourquoi, nous souhaitons éviter tous les gaspillages d’argent public et mieux contrôler les dépenses, notamment avec la conditionnalité des aides. Vous savez, nous avons déjà l’expérience de la gestion de nos collectivités, et de nombreux élus d’Europe écologie et des verts ont déjà prouvé leur intégrité en matière de gestion budgétaire. Depuis longtemps, ils mènent de nombreux combats pour moraliser la finance et la fiscalité publique. Je pense bien entendu à Eva Joly ou à Laurence Vichnievski en PACA. Mais aussi dans notre région, à une personne comme Etienne Tête a depuis toujours eu le souci de défendre les contribuables et les citoyens.


Concrètement, nous n’augmenterons pas les impôts sans consultation citoyenne de tous les rhônalpins, à partir de différents scénarios de dépenses et d’investissements de l’argent public. Et nous privilégierons le redéploiement de certaines dépenses qui sont pour nous inutiles, où la région « arrose là où c’est déjà mouillé », c’est-à-dire que nous ne financerons plus les entreprises cotées en bourse et nous stopperons les « fromages » de la région, comme par exemple les 3 millions d’euros dépensés pour le pavillon de la région Rhône-Alpes à l’exposition universelle de Shanghai.




10-Quelles sont vos propositions en matière de décentralisation et de réforme des collectivités territoriales ?


Il n’y a pas eu de véritable décentralisation, ni en 1982, ni ensuite, seulement des transferts de certaines charges, mais l’Etat est resté maître de toutes les décisions qui sont payées avec l’argent des régions. Nos propositions concernent le transfert de vraies compétences aux régions, notamment en matière d’urbanisme, de logement, de transports, d’environnement et d’aménagement du territoire. Les régions ont une bonne taille pour décider en proximité avec la réalité de terrain, tout en ayant une masse suffisante pour conduire des politiques globales. Il a été rappelé à COPENHAGUE que les régions détiennent entre 50 et 75% des solutions pour lutter contre le réchauffement planétaire.


Pour ce qui concerne l’organisation politique des collectivités, les écologistes ont proposé depuis plus de dix ans la suppression des départements, le renforcement de la région et des intercommunalités, ainsi que la nomination de leurs responsables par le suffrage universel et proportionnel. Il faut aussi une véritable autonomie budgétaire. Malheureusement, on va plutôt en ce moment vers la perte totale d’autonomie des régions et une recentralisation de toute l’organisation des collectivités. Je le dis avec solennité, le projet gouvernemental est en train de tuer les régions, sans doute qu’elles sont un peu trop impertinentes et libres ?

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