Gil Rivière Wekstein est directeur de la publication d’ Agriculture & environnement (A&E), lettre d’information mensuelle dont la vocation est « de faire entendre une voix critique et indépendante sur des sujets sensibles touchant le domaine agricole comme les OGM, les pesticides, la réforme de la PAC ou les négociations de l’OMC». Il est membre de l’Association française des journalistes agricoles (AFJA).
Son enquête ouvrage ne dit pas qu’il n y’ a pas de problème écologique pour les abeilles. Il dit qu’il y a une imposture à se servir de la cause écologique pour avancer des idéologies ou des thèses sans rigueur scientifique, au mépris d’une recherche objective. Gil Rivière Wekstein explique comment certains apiculteurs et certaines organisations ont utilisé d’une manière idéologique la cause écologique pour trouver des boucs émissaires, et masquer parfois leurs insuffisances ou chercher des aides pour sortir de leurs difficultés.
Un puits de lumière
Jean Fédon, ancien président du Syndicat des Producteurs de Miel de France, apiculteur professionnel à la retraite, ancien responsable de syndicats départementaux, rend un hommage particulier à l’auteur : pour lui Gil Rivière Wekstein ouvre un « puits de lumière » sur un dossier volontairement brouillé.
L’auteur rappelle d’abord que l’apiculture a longtemps été une production marginale, peu rentable. Il souligne que le secteur est très mal organisé et peu pris en considération. Il rappelle surtout que la culture de tournesol a permis dans les années soixante dix à certains apiculteurs de croire que l’apiculture pouvait être un secteur lucratif. Certaines années, on constatait alors des miellées de 100, 200 kilos là où les miellées n’étaient auparavant que de 20 à 40 kilos. Mais la production sur le tournesol n’a pas duré car les miellées de tournesol s’arrêtent parfois brutalement.
Causes multifactorielles
Alors estime Gil Rivière Wekstein, certains responsables apicoles ont cherché un bouc émissaire unique, en ciblant dans les fabricants de quelques molécules insecticides destinées aux semences, les insecticides Gaucho et Régent. Il rappelle qu’en France, et dans tous les pays européens, les chercheurs sont d’accord pour estimer que les causes des problèmes des abeilles sont « multifactorielles ».
Gil Rivière Wekstein nous apprend ainsi que les responsables apicoles qui montent au créneau ne sont pas des défenseurs de l’environnement et du bio, loin de là. Maurice Mary, président de l’UNAF (Union Nationale des Apiculteurs de France), est le patron d’une grosse entreprise familiale de production qui compte 3000 ruches, mais importe et vend des produits de la ruche, dans sept boutiques en France, avec un épais catalogue. Longtemps, Maurice Mary a une approche économique et l’UNAF sous-estime même de côté les questions sanitaires, techniques, de qualité. Le syndicat refuse même normes et contrôles qui permettent de vérifier si le miel est importé, contient ou non des pesticides. Le syndicat s’oppose même en 1997 au miel bio. De même, l’UNAF, refus de prendre en compte du Varroa, malgré les mises en garde.
Médias sollicités, politiques sous pression
Gil Rivière Wekstein développe longuement les dossiers Gaucho et Régent. En 1997 le Gaucho est subitement signalé comme un gros problème depuis quatre ans, alors que nulle part auparavant, il n’en n’a été fait mention. Gil Rivière Wekstein explique comment les animateurs de la Coordination apicole font alors monter la pression, entretiennent des liens avec certains médias, repoussent certaines études, sans qu’on avance sérieusement sur le plan scientifique, sur le phénomène mis en avant des effondrements de ruchers. Il explique la manière dont les politiques réagissent eux-mêmes à la pression qui s’exerce sur certains scientifiques. Il rappelle que le Gaucho n’est interdit dans aucun pays européen, ni même soupçonné d’être à l’origine de problèmes. Mais le contexte est propice à orienter le dossier : le précédent du sang contaminé est récent et l’avocat de l’UNAF, Me Fau s’occupe du dossier de l’hormone de croissance.
Gil Rivière Wekstein explique comment la volonté d’attaquer seulement les molécules Gaucho de Bayer, fait écarter dans le sud ouest, le fait que des abeilles ont été intoxiquées par la dissémination d’insecticides bricolés par des agriculteurs. Chez l’apiculteur Jean Claude Gauquil, on a retrouvé 0,29 milligramme par kilo de coumaphos, un dangereux insecticide qui n’a d’autorisation de mise sur le marché que pour les chiens. Le dossier passe ensuite du Gaucho à base d’imidaclopride au Régent TS, à base de Fipronil, avec une dénonciation aussi véhémente, mais toujours aussi systèmatique.
Gil Rivière Wekstein décrit au passage comment les dossiers sont animés par un réseau relativement étroit de personnes ou de structures, dans lesquels on retrouve l’association Terre d’Abeilles, dirigée par Béatrice Robrolle, belle fille de Maurice Mary. Il souligne comment l’extrême gauche, rejoint la droite anti-européenne et anti-mondialiste, comment le systèmatisme pousse Edouard Goldsmith,ou Jean Marie Pelt, à développer des thèses sans fondement scientifique. Il explique comment certaines expertises sont confiées systèmatiquement à des chercheurs proches de l’UNAF.
L’auteur de ” Abeilles, l’imposture écologique”, rappelle aussi comment dans le dossier, bien des travaux scientifiques sont mis de côté, comme la mise hors de cause des insecticides par des chercheurs espagnols.
La lecture du livre permet une conclusion. Les abeilles sont bien malades de dérèglements environnementaux, mais les causes sont loin d’être simples.
Abeilles : l’imposture écologique, par Gil Rivière Wekstein. Le livre peut être téléchargé sur le site du Publieur: http://www.lepublieur.com/default.asp?src=/web/author_public.asp&id_per=17367