Jean-Paul FAUCON, Michel AUBERT, Marie-Pierre CHAUZAT, chercheurs à l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments ont signé une étude après une enquête prospective multifactorielle sur l’influence des agents microbiens et parasitaires, et des résidus de pesticides sur le devenir de colonies d’abeilles domestiques en conditions naturelles. L’enquête a été financée par l’ AFSSA, la direction générale de l’alimentation et Fonds Européen, d’Orientation et de Garanie Agricoles (FEOGA)
Des apiculteurs volontaires
Les chercheurs ont réalisé une étude portant sur 120 colonies d’abeilles, réparties dans 24 ruchers dans cinq départements : Eure, Gers, Indre, Gard et Yonne. Les miellées ( la ressource en fleurs) étaient constituées de colza, de tournesol et d’une ressource « toutes fleurs »
Les apiculteurs qui ont participé à l’étude étaient volontaires, mais représentatifs de plusieurs types d’activité, professionnels, mais aussi amateurs. Les colonies suivies ont été tirées au sort dans les ruchers. Les apiculteurs, assurés de la confidentialité, se sont engagés à ne pas changer leur pratique ( sous entendu, même si elle n’était pas conforme aux pratiques recommandées). Le but était d’inclure dans le système, le facteur humain, le facteur apiculteur qui est évidemment non négligeable. La situation sanitaire d’un élevage dépend étroitement de la manière dont on s’en occupe. Des conseils ont même été donnés pour améliorer au contraire la prise en charge de certains problèmes, et des lanières anti-varroa ont été distribuées pour réduire les effets du parasite sur les colonies. Les colonies mortes, ont été remplacées, pour maintenir l’effectif total étudié jusqu’au bout de l’étude.
Les résultats ont montré pendant trois ans, une mortalité inférieure à 10%, pour tous les ruchers, ce qui n’est pas exceptionnel. Pour aucun rucher, n’ont été constatés des effondrements comme ceux qui sont mentionnés par les témoignages de certains apiculteurs ou responsables apicoles. Parmi les sept maladies connues comme responsables de difficultés chez les abeilles, six ont été communément retrouvées dans les colonies.
Les chercheurs se sont intéressés à l’impact des insecticides sur la santé des abeilles. Le nombre de résidus d’insecticides trouvés dans tous les ruchers a varié de 0 à 9. Dans dans le cas le plus fréquents, pour 26 % des cas, les résidus de 2 insecticides ont été retrouvés. Dans 12,7% des cas aucun pesticide n’a été retrouvé. Dans le pollen, la matrice miel, les résides d’imidaclopride et de acide 6 nicochloronicotinique ont été retrouvés les plus fréquemment. Les traces retrouvées ont pu être de 2 microgrammes par kilo alors que pour les abeilles la dose mortelle est de 40 à 60 microgrammes par kilo. Un microgramme est un millionnième de gramme. Aucune corrélation n’a pu être établie entre la présence de ces résidus, et la population d’abeilles, ou de larves et la mortalité des colonies. Le même constat a été réalisé pour la molécule du fipronil.
Facteur apiculteur
Les chercheurs ont mis en relief l’importance des soins apportés par les apiculteurs dont le comportement, la connaissance des maladies, du milieu, de l’abeilles, les conditions d’exploitation étaient qualifiées en trois niveaux. Les chercheurs ont observé les déclarations, les comportements des apiculteurs en matière de gestion globale, mais aussi en matière sanitaire. Les apiculteurs qui traitaient contre le Varroa, étaient ceux dont les colonies souffraient le moins du parasite. Pour ce seul parasite, l’étude a montré qu’un tiers des ruches étaient fortement infestées, et qu’entre 4,2% et 20,8 % des apiculteurs ne traitaient pas. L’étude a confirmé ce que certains apiculteurs disent par ailleurs confidentiellement, l’utilisation de préparations « maison » par certains apiculteurs. Le Coumaphos, un acaricide qui n’était plus disponible en France était remplacé par un acaricide pour chien, avec bien sûr des traces importantes retrouvées dans le miel, la cire, les abeilles.
L’étude de l’AFSSA ne manquera pas de provoquer des remous, mais elle devrait aussi faire avancer le débat non seulement scientifique , mais aussi politique sur la prise en compte de l’apiculture.