Lors d’une audience solennelle ce jeudi la Chambre régionale des Comptes d’Auvergne-Rhône -Alpes, a présenté le bilan de son activité en 2023, une activité en fort accroissement depuis quelques années. Les magistrats et leurs équipes ne plaisantent pas quand les gestionnaires d’argent public dérapent.
Pour rappel, la Chambre régionale des Comptes d’Auvergne Rhône-Alpes est en charge du contrôle du bon usage des fonds publics par diverses institutions en région. La Chambre emploie 42 magistrats, 42 vérificateurs, 8 greffiers et 12 personnels administratifs et techniques. Ces équipes sont très renouvelées, au fil des passages des fonctionnaires d’une institution à l’autre, gage d’une ouverture en matière de compétences. Au 1er janvier, 40% des magistrats et 37% des vérificateurs avaient moins de 3 ans d’ancienneté dans la juridiction.
Vigie au service des citoyens
» Les moyens de contrôle mis à notre disposition augmentent légèrement, du fait de la création d’un poste de magistrat et de deux postes de
vérificateur. Ces moyens sont à mettre au regard de l’ampleur des missions et si nul ne se plaint d’être peu contrôlé, ce qui assez naturel, la démocratie a besoin d’une parole indépendante, compétente et impartiale sur la régularité et l’efficacité de la gestion publique. C’est le prix de la confiance en nos élus, à la base du fonctionnement des démocraties, à l’opposé des régimes dictatoriaux, qui reposent sur la défiance envers tous, et des régimes illibéraux, où la faiblesse des contrôles et l’absence de vérité partagée profitent aux plus puissants. » a rappelé Bernard Lejeune, président. » Nous avons la conviction d’agir au service de la démocratie et je n’ai pas de doute sur la capacité de la chambre à accompagner ( … …) les évolutions de la gestion publique locale, avec le sérieux et la sérénité qui lui sont reconnus dans son rôle de vigie au service du citoyen. »
91 rapports d’observation
Premier rôle de la Chambre : contrôler les comptes et les gestion des institutions dont les ressources sont en grande partie ou totalement publiques. En 2023, dans sa mission de contrôle, la chambre a produit 117 rapports d’instructions. C’est une augmentation sensible de l’activité. Elle a notifié 91 rapports d’observations définitives rendus publics, accessibles sur son site . Ces rapports présentent aux gestionnaires publics ( par exemple les maires, présidents de Région, de départements, etc.) des recommandations. Trente avis de contrôle des actes budgétaires ont montré 4 collectivités présentant un budget adopté ou exécuté en déséquilibre.
Les cas d’irrégularités les plus graves ont entrainé la saisine du Procureur général près la Cour des comptes à deux reprises, dans le cadre de la mise en œuvre du nouveau régime de responsabilité financière des gestionnaires publics. Dix fois , c’est au procureur de la République que le dossier a été transmis en vue d’éventuelles poursuites.
Des dossiers transmis au Parquet
Les signalements à l’autorité judiciaire en 2023 concernent six situations d’octroi d’avantage injustifié dans les marchés publics ; deux de prise illégale d’intérêts, dont une cumulée avec des faits de favoritisme et de pantouflage ; un dossier de travail dissimulé avec abus de bien social ; enfin, deux affaires de détournement dont une concernant l’emploi fictif d’un ancien élu de la collectivité et accompagnée de corruption, faux et usage et abus de bien social.
Anti-corruption
Les juridictions judiciaires ont rendu en 2023 suite à signalements de la chambre, cinq jugements, tous de condamnation. Deux arrêts d’appel sanctionnent du favoritisme, dont un avec une prise illégale d’intérêts. Les jugements de première instance se rapportent à du travail dissimulé et à une situation de prise illégale d’intérêts avec faux et usage. Une autre affaire mêlant favoritisme, corruption d’agent public et trafic d’influence.
La conclusion d’un dossier transmis par la Chambre à la justice, l’obtention irrégulière d’un marché de construction et de l’acquisition d’un terrain avec l’Hopital d’Annecy, illustre cette utilité de la juridiction financière. Les sociétés Bouygues Bâtiment Sud-Est et Linkcity Sud-Est ont accepté une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) éteignant l’action publique à leur encontre en contrepartie du versement d’une amende de près de 8 millions d’euros. S’ajoute la mise en œuvre d’un programme de mise en conformité sous le contrôle de l’Agence française anticorruption pendant trois ans de l’ensemble du groupe Bouygues construction, contrôle facturé 1,3 million d’euros. Huit millions d’euros, c’est à peu près le budget annuel de la Chambre régionale, rappelle son président.