Suite au recours de la commune de Grande-Synthe, le Conseil d’État enjoint le Gouvernement d’adopter d’ici au 31 mars 2022 de nouvelles mesures bien plus ambitieuses pour que la France respecte les objectifs de l’Accord de Paris.
La commune de Grande-Synthe et plusieurs associations (Oxfam France, Greenpeace France, Notre Affaire à Tous, Fondation Nicolas Hulot), avaient déposé à l’automne 2020 un recours pour inaction climatique de l’Etat auprès du Conseil d’État en vue de l’obliger à prendre les mesures indispensables pour atteindre l’objectif, issu de l’Accord de Paris, de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici à 2030.
En réponse, le Conseil d’État a demandé au Gouvernement, le 19 novembre 2020, de justifier, dans un délai de trois mois, que l’objectif de réduction des émissions de gaz à effets de serre pour 2030 (- 40 % par rapport à 1990) pourra être respecté sans mesure supplémentaire. Le Gouvernement a transmis de nouveaux éléments. Une nouvelle instruction contradictoire a été ouverte et une audience publique s’est tenue le 11 juin.
2019-2020 : une baisse relative des émissions
Pour atteindre l’objectif de – 40 % d’émissions en 2030 par rapport au niveau de 1990, le Gouvernement a adopté un calendrier en quatre périodes : 2015-2018, 2019-2023, 2024-2028 et 2029-2033. Chaque période comporte des objectifs de réduction inscrits dans un « budget carbone ».
Le Conseil d’État note que l’année 2019 respecte l’objectif annuel fixé pour la période 2019-2023. Mais la baisse des émissions de 0,9 %, apparaît limitée par rapport aux objectifs de réduction visés pour la précédente période (2015-2018), qui étaient de 1,9 % par an. Cette baisse est inférieure aux objectifs fixés pour la période suivante (2024-2028), qui sont de 3 % par an.
Les données provisoires pour 2020 montrent une baisse en trompe l’œil permise par les effets du confinement sur l’activité. Cette seule baisse ne permet pas de garantir que la trajectoire fixée pour atteindre les objectifs de 2030 pourra être respectée.
Accélérer fortement
D’énormes efforts supplémentaires sont nécessaires à court terme pour atteindre l’objectif de 12 % de baisse des émissions par rapport à 1990 entre 2024 et 2028, fixé par la stratégie nationale bas carbone (SNBC) contre seulement – 6 % entre 2019 et 2023.
Or, le Conseil d’État estime que les éléments transmis par le Gouvernement ne sont pas convaincants. Des avis publiés entre 2019 et 2021 par le Commissariatl général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), par le le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et le Haut Conseil pour le Climat (HCC) , soulignent que l’objectif de réduction de 12 % ne pourra être atteint si de nouvelles mesures ne sont pas adoptées à court terme.
Le Conseil d’État souligne par ailleurs que l’accord entre le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne d’avril 2021 a relevé l’objectif de réduction des émissions gaz à effet de serre de 40 à 55 %. Enfin le Gouvernement reconnaît lui-même que les mesures en vigueur ne permettent pas d’atteindre l’objectif de diminution de 40 % des émissions en 2030, puisqu’il compte sur les mesures prévues par le projet de loi « climat et résilience » pour atteindre cet objectif.
En l’absence de mesures supplémentaires permettant de respecter la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le Conseil d’État fait droit à la demande des requérants. Il enjoint au gouvernement de prendre avant le 31 mars 2022 « toutes les mesures nécessaires » pour atteindre l’objectif sous-tendu par l’Accord de Paris.