Le Gouvernement a présenté le 18 février les détails de la réglementation environnementale des bâtiments neufs RE2020, dont l’entrée en vigueur est repoussée de six mois, au 1er janvier 2022.
Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du Logement, a annoncé par visioconférence le 18 février les dernières décisions concernant la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs, la RE2020.
Après l’annonce des principales orientations par le ministère de la Transition écologique le 24 novembre dernier, de nouvelles décisions sont venues clore la phase de consultation, au cours de laquelle le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE) a rendu un avis et ses recommandations. Cette phase a permis de procéder à plusieurs ajustements du projet tout en conservant son ambition initiale.
Ainsi, l’entrée en vigueur de la RE2020 est finalement repoussée au 1er janvier 2022, après une publication des textes d’ici la fin du premier semestre. Cette date laisse les quelques mois nécessaires à l’ensemble de la filière et notamment aux concepteurs et promoteurs pour mettre leurs projets à venir en conformité avec les nouvelles exigences. La mise en œuvre de la RE2020 sera par ailleurs l’occasion de simplifier les formalités administratives au moment du dépôt du permis de construire.
De la même manière et afin d’assurer que la trajectoire fixée par la RE2020 permet aux innovations et développements industriels nécessaires de se déployer à temps, les autres jalons prévus par la RE2020 sont décalés d’un an (les dates de 2024, 2027 et 2030 devenant 2025, 2028 et 2031). Globalement, les exigences fixées par la RE2020 demeurent cependant inchangées, qu’il s’agisse de sobriété énergétique, de sortie des énergies fossiles, d’amélioration du confort d’été ou de décarbonation de la construction tout le long du cycle de vie.
Ajustements
La concertation a permis de procéder à plusieurs ajustements, concernant notamment le les chauffage au gaz, par réseau de chaleur ou au biométhane.
En maison individuelle, où les solutions non fossiles sont très courantes et parfaitement maîtrisées (notamment la pompe à chaleur ou le chauffage biomasse), le seuil sera fixé à 4 kg CO2/m2/an dès l’entrée en vigueur de la RE2020 et exclura de fait des systèmes utilisant exclusivement du gaz. Ainsi, des permis de construire pour des maisons individuelles chauffées au gaz pourront encore être obtenus jusqu’à fin 2023 lorsqu’un permis d’aménager prévoyant une desserte en gaz a déjà été délivré.
En logement collectif, la transition sera progressive entre 2022 et 2025, car aujourd’hui encore 75 % des logements collectifs nouvellement construits sont chauffés au gaz. Les alternatives (pompes à chaleur individuelles, réseau de chaleur, chaufferie biomasse, pompe à chaleur collective, solaire thermique) sont nombreuses, mais doivent encore se développer à grande échelle et la filière doit s’approprier les conceptions qui accompagnent ce changement. Aussi le seuil sera d’abord fixé à 14 kg CO2/an/m², laissant ainsi encore la possibilité d’installer du chauffage au gaz à condition que les logements soient très performants énergétiquement. Ensuite, dès 2025, le seuil sera ramené à 6,5 kg CO2/m2/an, excluant de fait le chauffage exclusivement au gaz, mais permettant le développement de solutions innovantes, y compris hybrides (telles des pompes à chaleur utilisant un appoint de gaz en cas de grand froid).
Un régime spécifique sera également prévu pour encourager le développement des réseaux de chaleur, qui constitue un enjeu stratégique de la politique nationale de décarbonation du chauffage des bâtiments. Il s’agit de donner un temps suffisant aux réseaux de chaleur existants pour réaliser les investissements nécessaires à leur décarbonation : entre 2025 et 2028, pour les logements collectifs chauffés via un réseau de chaleur existant, le seuil sera abaissé à 8 kg CO2/an/m2, puis à 6,5 kg CO2/an/ m2 à partir de 2028. Actuellement, 73 % des réseaux de chaleur respectent déjà le seuil de 8 kg CO2/an/ m2. Les autres seront fortement incités à investir dans leur décarbonation d’ici 2025.
En parallèle, la réflexion sur des mécanismes spécifiques de développement du biométhane pour les projets de construction se poursuivra.
Mixité des matériaux
Emmanuelle Wargon a souligné que la réglementation repose sur une exigence de résultat et non de moyens. Le bois et les matériaux biosourcés sont amenés à occuper une place croissante mais la nouvelle réglementation encouragera aussi le recours aux matériaux géosourcés (comme la pierre de taille ou la terre crue) et aux matériaux plus usuels (brique et béton notamment) qui se seront décarbonés, ainsi que l’introduction de davantage de mixité des matériaux.
À cet égard, des ajustements concernant les seuils de l’impact carbone de la construction ont été présentés, qui, tout en conservant une pleine cohérence avec la stratégie nationale bas-carbone, permettent d’assurer qu’à l’horizon 2031 (dernier jalon fixé par la RE2020), des modes constructifs variés auront leur place et que, sous réserve de leurs engagements de décarbonation, tous les matériaux continueront d’être utilisés, selon leurs atouts respectifs. Dans cette perspective, un appel à manifestations d’intérêt (AMI) dédié à la mixité des matériaux est d’ailleurs annoncé, financé par le Programme d’investissements d’avenir (PIA 4)
Des travaux de normalisation au niveau français et européen seront par ailleurs engagés sur la méthode d’ « analyse en cycle de vie dynamique » retenue pour la réglementation pour décompter les émissions carbone tout au long de la durée de vie du bâtiment et prendre en compte le stockage temporaire du carbone.
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