Dans un courrier adressé à l’association Adeni, le porteur d’un projet de cogénération biogaz annonce son intention de diviser par 3 la capacité des installations, qui valoriseront les effluents d’élevage de l’exploitation Saint Louis sur le commune nord-iséroise d’Anthon.
Entre les intentions affichées des pouvoirs publics, qui veulent développer les systèmes de méthanisation à partir de déchets agricoles et de boues d’épuration (1 500 projets annoncés pour les 3 ans à venir par Ségolène Royal) et la réalisation, il y a toutes les difficultés de faire exister un projet.
Pierre Jargot l’a expérimenté, lui qui avec son frère Philippe, souhaite depuis 2009 valoriser les lisiers et effluents de leur atelier d’engraissement de bovins à viande (jusqu’à 800 têtes principalement des charolais).
Ils créent d’abord sur le site de l’exploitation une plateforme de compostage avec l’aide de Valterra un partenaire industriel, puis constituent avec 8 autres agriculteurs voisins la SAS Saint-Louis Energies, qui porte le projet de méthanisation territoriale agricole : Cogénération biogaz d’une puissance de 2 126 kWé, production attendue 17 400 MWh/an thermique et 16 500 MWh/an électrique, pour un investissement global de 14 M€.
Seulement la ferme d’Anthon, qui produit moins de 12 000 tonnes de déchets par an ne suffit pas à rentabiliser un outil dimensionné pour traiter jusqu’à 72 000 tonnes d’intrants.
Il faut donc aller chercher dans les départements voisins boues d’épurations et autres déchets. C’est là que le bât blesse.
Les réunions publiques de 2015, malgré le soutien du vice-président de la Région, Benoit Leclair, de Rhône-Alpes Energie Environnement et la volonté des promoteurs d’apaiser les débats, montreront largement les questions posées par la nature et l’origine des produits entrants, le dimensionnement des accès, les risques de nuisances olfactives, la pollution et les encombrements induits par les camions approvisionnant l’installation.
L’Adeni (Association de Défense Environnementale du Nord-Isère) quant à elle, parle de projet « économiquement absurde et de massacre écologique ». Son président, Yves Bellon pointe les dérives d’un projet détourné de son objet initial : la valorisation des déchets d’une exploitation agricole locale.
Photo à l’appui il dénonce l’origine et « la qualité des déchets traités, qui n’ont plus rien de verts ».
Un nouveau projet 3 à 4 fois plus petit
L’association a-t-elle été entendue ?
Quoi qu’il en soit, dans un communiqué qu’il adresse à l’Adeni, mi-décembre dernier, le président de Saint-Louis Energies indique qu’il a « décidé de retirer le Dossier de Demande d’Autorisation d’Exploiter de cette version, afin d’élaborer un nouveau projet de méthanisation totalement distinct du premier : cette unité acceptera près de trois fois moins de gisement entrant, pour une puissance installée quatre fois plus petite que le projet initial ».
En clair il est prévu de traiter au maximum 27 500 tonnes de déchets agricoles, provenant à 60 % d’exploitations agricoles partenaires et de proposer une opportunité pour des déchets agro‐alimentaires ou de collectivités, réglementairement admis à la méthanisation, par exemple les déchets céréaliers des coopératives agricoles du secteur.
En fait, explique Pierre Jargot, les nouvelles dispositions de la Loi de transition énergétique ne garantissent pas de tarif de rachat aux installations de cogénération supérieures à 500 MWh/an. Elles doivent procéder par appel d’offres, ce qui rend pour lui l’avenir trop incertain.
Un nouveau projet sera donc présenté le 1er trimestre 2016. L’Adeni se dit plus que jamais mobilisée, mais si la démarche nouvelle apportait des garanties suffisantes sur la conformité des installations et l’aménagement de la voirie d’accès, cela pourrait-il être le début d’un rapprochement entre riverains et exploitants ?