En annonçant la tenue d’un référendum que ni la loi, ni la Constitution ne prévoient, François Hollande cultive les clientélismes locaux et fait exploser la notion d’intérêt général dans une République qui doit reposer sur le partage d’une vision de la société.
La France a bien du mal à développer une démocratie participative. Elle n’y parvient pas, et les référendums viennent toujours d’en haut. La Région Rhône-Alpes avait voulu en introduire l’idée d’initiative populaire dans son règlement il y a six ans avait dû rendre les armes devant la riposte de l’Etat. Et les nouveaux élus n’ont pas osé une nouvelle tentative.
En proposant un référendum sur le projet d’aéroport de Notre-Dame-des- Landes, le chef de l’État exprime un triple aveu.
Il affiche son incapacité à exprimer une vision du développement de la France après des années d’études et de travaux autour du projet. Il avoue son besoin de consolider par avance un gouvernement tout neuf qui pourrait éclater au moindre désaccord. Il gère un dossier régional en faisant exploser la notion fondamentale d’intérêt général et de rôle de l’État.
La bonne démarche aurait dû consister à lancer il y a longtemps une réforme de la consultation des citoyens
Quels projets soumis à débat?
Aujourd’hui, les réactions pleuvent. Elles mettent en avant les inconnues du futur éventuel référendum. Il faudra déterminer quels seront les projets soumis à référendum. Or, aujourd’hui encore, des projets importants peuvent ne pas être soumis à Débat public. C’est le cas des accès français du Lyon Turin, qui n’ont fait l’objet que d’une simple enquête publique . Le projet d’Autoroute A 45 de même, n’a fait l’objet que d’une enquête et d’une DUP.
Qui pose la question?
Il faudra savoir qui pose la question et quelle question. Il faudrait savoir l’importance du périmètre. Il est évident que l’ouverture d’une déchèterie ou d’une chaufferie n’a pas le même impact que celui d’un aéroport régional. Les électeurs sont-ils ceux de la zone où les terrains sont expropriés ? Ceux de la zone impactée par les futures nuisances sonores et par les futures émissions polluantes ? Les électeurs impactés par le trafic routier ? Les électeurs seront-ils les électeurs des départements concernés, des deux régions concernées, ceux des départements qui peuvent espérer bénéficier de l’aéroport ? La question est aussi celle de la campagne, des moyens financiers accordés aux diverses opinions ?
Que deviennent les DUP?
Il faudrait trancher quant au sort de la Déclaration d’Utilité Publique, qui engage État, et trancher sur les indemnisations à verser aux entreprises et autres parties prenantes au dossier. Les autres projets bénéficiant de DUP pourront évidemment être remis en cause. Promettre un référendum, sur un seul projet pour des raisons politiques, un soir devant les caméras de la télévision n’est pas une position tenable!
Il faudra lancer et éclater quelques mois une forme de fond sur les référendums. C’est toute une architecture qu’il faut imaginer dans un pays figé. Il faudra surtout définir comment devront se gérer les équilibres entre différents niveaux d’intérêt. L’intérêt individu peut être géré par une indemnisation.
Mais comment peser un intérêt local, un intérêt territorial, et comment mettre en face de ces intérêts, l’intérêt général expression de l’intérêt de l’ensemble de la communauté nationale. Cette architecture, appelée à démanteler plus encore l’unité nationale, rendra indispensable une nouvelle réforme de la Constitution.