L’Institut Géographique National ( IGN) est spécialisé dans la production de données géographiques, mais il est aussi une vigie de la forêt et producteur de statistiques forestières nationales. Il publie les résultats de l’Inventaire forestier national (IFN) qui permet une meilleure connaissance et un meilleur suivi des forêts françaises, publiques et privées.
Ces données confirment que les forêts sont de plus en plus affectées par le changement climatique. Pour 2024, les données de l’Inventaire Forestier National ( IFN) confirment une mortalité des arbres en forte hausse, et un ralentissement de la croissance des arbres. La conséquence est claire : la forêt remplit moins son rôle de puits de carbone.
Le réservoir total de carbone de l’écosystème forestier en métropole est estimé à 2,8 milliards de tonnes de carbone, réparti dans les arbres vivants recensables (45 %), les arbres morts (4 %), la litière qui recouvre les sols (5 %) et la matière organique contenue dans les 30 premiers centimètres du sol (46 %).
L’année 2024 et sa forte pluviométrie ont succédé à une année 2023 de sécheresse et à une année 2022 marquée par la combinaison de sécheresses, de canicules et de grands incendies. Ces bouleversements
climatiques affectent gravement les forêts, comme le montrent les résultats des campagnes annuelles 2019-2023 de l’Inventaire forestier national.
Une surface en augmentation
La surface forestière continue d’augmenter en France hexagonale et en Corse : la forêt couvre 17,5
millions d’hectares, soit 32 % du territoire. Mais la croissance du volume total des arbres ralentit. Les forêts sont impactées par le dérèglement climatique ayant entrainé des conditions de vie de plus en plus défavorables pour les arbres . Le manque d’eau et les températures élevées détériorent leurs conditions de vie. Ce dérèglement favorise la prolifération de bioagresseurs (champignons, insectes, bactéries…). Cela a un impact sur la croissance et la mortalité des arbres.
L’IGN observe un bilan net des flux d’évolution du volume de bois sur pied des forêts divisé par deux en 10 ans. La croissance annuelle de bois sur pied avait été de +41,7 Millions de mètres cubes Mm3/an sur la période 2005-2013 . Elle a chuté à +19,5 Mm3/an sur la période 2014-2022). Les raisons sont les suivantes. Les arbres ont poussé moins vite. Le ralentissement a été de 4 % pour la croissance des arbres . L’accroissement annuel est passé de 91,5 Mm3/an en 2005-2013 à 87,9 Mm3/an en 2014-2022.
Forte accélération de la mortalité
L’inventaire note aussi une très forte accélération de la mortalité des arbres avec un doublement en 10 ans . La mortalité est passée de 7,4 Mm3/an en 2005-2013 à 15,2 Mm3/an en 2014-2022), ce qui représente 0,5 % du volume total d’arbres présents en forêt .
L’inventaire note aussi une augmentation de 13% des prélèvements d’arbres qui sont passés de 47,2 Mm3/an en 2005-2013 à 53,1 Mm3/an en 2014-2022. La comparaison entre les deux périodes comprend des coupes subies , celles de la tempête Klaus de 2009, et la récolte des arbres morts et dépérissant avant dépréciation, coupes préventives visant à stopper la prolifération des bioagresseurs.
Croissance moins rapide
Le ralentissement de l’accroissement biologique entraine une moindre absorption de carbone des
forêts. Lors de leur croissance, les arbres absorbent par la photosynthèse le carbone atmosphérique et le stockent dans le bois. L’IGN dénombre 11,3 milliards d’arbres en 2023 qui représente un stock de 1300 millions de tonnes de carbone, soit 1,3 milliard de tonnes.
Ce stock évolue continuellement en fonction de l’intensité́ des flux de bois entrants (production de bois stockant du carbone) et sortants (mortalité́, prélèvements). Lorsque le bilan des flux est positif, le stock de carbone en forêt s’accroît, permettant ainsi de réduire la quantité́ de CO2 de l’atmosphère. À l’inverse, si le bilan est négatif, le stock diminue et il y a un transfert du carbone des forêts vers l’atmosphère.
Stockage de carbone dans les sols
Ce résultat porte sur la seule biomasse des arbres sur pied. Il n’aborde pas le point complexe de l’évolution de la teneur en carbone des sols forestiers. En moyenne sur la période 2014-2022 (bilan net), les forêts métropolitaines ont absorbé 39 millions de tonnes de CO2 par an, ainsi transformés en biomasse. Chaque hectare de forêt contient aujourd’hui en moyenne 81 tonnes de carbone dans ses arbres vivants, contre 73 en moyenne en 2009. Le stock de carbone a crû de 17 % entre 2009 et 2023.
Mais depuis quelques années, un ralentissement notable de cette dynamique est constaté, du fait de la
multiplication des crises sanitaires combinées à des épisodes de forte sécheresse et de canicule. Certains massifs présentent des niveaux de mortalité et de prélèvement (notamment des coupes sanitaires) supérieurs à la production biologique.
C’est cependant sur le long terme, celui de la vie des arbres, qu’il convient d’analyser la dynamique des massifs forestiers car de nombreux facteurs conjoncturels (catastrophes naturelles, crises sanitaires, sécheresse, etc.) et structurels (ancienneté des peuplements, état du renouvellement, etc.) modifient sans cesse les flux et donc l’évolution du stock de bois et de carbone. Le renouvellement des forêts sinistrées par des peuplements plus résilients est une condition sine qua non pour le maintien de la fourniture des biens et services attendus de la part des écosystèmes forestiers.
Le Mémento de l’Inventaire forestier et les résultats 2024 sont sur : www.ign.fr/espace-presse/memento-2024
