A l’heure où la transition écologique préoccupe l’ensemble des gouvernements, la mobilisation des acteurs financiers s’avère cruciale pour aboutir à la décarbonation de notre économie. Les banques se doivent à la fois de réorienter massivement leurs investissements vers des projets bas carbone et accompagner les consommateurs dans la mesure et la compréhension de leur impact afin de mieux accompagner les changements de modes de vie.
Dans un monde post-Covid, la transition écologique occupe tous les esprits. Le gouvernement français ne s’y est d’ailleurs pas trompé en y consacrant 30 milliards d’euros dans le cadre de son plan de relance économique de 100 milliards. Objectif : accélérer la décarbonation de notre économie. On ne peut que se féliciter d’une telle initiative. Il aurait été toutefois important de rendre l’ensemble des 100 milliards compatible avec l’objectif de limiter à 2 °C le réchauffement climatique, mais on le sait, l’État ne peut pas tout. Les acteurs privés se doivent donc, eux aussi, de s’impliquer dans cette profonde transformation de notre modèle économique.
À cet égard, la mobilisation des banques représente une impérieuse nécessité. Une mobilisation découlant, certes, d’une réglementation de plus en plus forte en faveur de la construction d’un système financier plus responsable. Sans le monde financier, il est en effet acquis qu’il sera impossible d’atteindre les objectifs de développement durable (ODD) voulus par les Nations Unies. Et pour cause : le financement de ces 17 ODD est estimé par plusieurs organisations internationales entre 5 000 et 7 000 milliards de dollars par an. Le rôle de la finance s’avère donc crucial !
Réorienter les flux financiers
Régulièrement pointées du doigt pour leur soutien financier à des activités fortement consommatrices d’énergies fossiles, les banques se doivent aujourd’hui d’engager les moyens financiers, humains et techniques nécessaires afin de mettre en place des méthodes robustes permettant de déterminer pour chaque engagement et chaque investissement s’il est compatible avec l’objectif des 2 °C. Les banques ont clairement vocation à prendre une part active dans la transition écologique. Acteurs majeurs du développement économique, elles se doivent en effet d’accompagner cette mutation vers une économie plus responsable et plus positive.
Pour y parvenir, la réorientation des flux financiers constitue un levier majeur. Elles doivent non seulement réduire l’exposition de leurs portefeuilles d’investissement et de financement au charbon et aux énergies fossiles, mais surtout rediriger massivement leurs investissements vers les infrastructures d’énergies bas carbone et vers des produits financiers « verts » ou socialement responsable (« green bonds », fonds ISR ou à impact positif, …). Depuis la signature de l’Accord de Paris en 2015, les acteurs bancaires se sont mis en ordre de marche, en présentant des stratégies de sortie des énergies fossiles. Mais la route est encore longue pour que ces flux financiers soient totalement compatibles avec les objectifs climatiques de cet Accord de Paris.
Une banque éthique en manque d’innovation
Les banques se doivent également de repenser leur modèle pour faire la part belle à une activité plus éthique afin, justement, de financer davantage les projets à fort impact social et environnemental. Durant les dernières décennies, en Europe, nous avons ainsi pu voir fleurir un certain nombre de banques éthiques dont la vocation est d’avoir un impact positif sur le plan économique, social et environnemental. En France, la Nef (Nouvelle Economie Fraternelle) a ainsi vu le jour dès 1988. Mais force est de constater que ces acteurs demeurent encore confidentiels, n’ayant pas réussi à convaincre le grand public de se rallier à leur cause.
De fait, la banque éthique n’a pas réussi à prendre pleinement le virage digital. A l’inverse des néobanques ou des banques traditionnelles, la banque éthique ne propose toujours pas une offre 100 % mobile qui facilite le quotidien de ses clients grâce à une application dont la fluidité de l’expérience client permet une gestion au quotidien de l’ensemble des opérations bancaires. Ainsi, la mise en relation se fait toujours de manière physique, un processus qui n’est clairement plus adapté aux usages. Les banques éthiques auraient donc tout à gagner à faire évoluer leurs outils afin de séduire une nouvelle génération particulièrement sensible aux enjeux environnementaux et sociaux.
Améliorer l’empreinte carbone des Français
Mais il serait utopique ou illusoire de ne compter que sur les banques. La transition écologique est en effet l’affaire de tous. Il est impératif de prendre conscience que nous avons tous un rôle à jouer, tant individuellement que collectivement. Chacun d’entre nous se doit en effet de maîtriser ses émissions de gaz à effet de serre, d’autant que leurs réductions constituent une urgence absolue. Les acteurs financiers se doivent donc d’inciter et d’accompagner les citoyens vers un changement de leurs habitudes de consommation. De fait, à titre individuel, nous nous devons de connaître notre impact carbone pour mieux le maîtriser et revoir nos modes de consommation.
En parallèle, il est impératif de récompenser les bons comportements. Pour améliorer l’empreinte carbone des Français, il est donc primordial que les acteurs financiers leur donnent de la visibilité sur cette empreinte tout en les accompagnant et en les guidant vers un mode de vie bas carbone grâce à des outils dédiés de réductions des dépenses sur des postes qui peuvent être maîtrisés, en leur proposant notamment des produits écoresponsables. Les banques devraient mettre plus en avant leur gamme de produits d’épargne dit « vert » ou qui ont un impact positif sur la société et l’environnement, trop peu connus et très peu proposés à leurs clients. Enfin et surtout, elles se doivent de montrer de la transparence quant à l’utilisation des fonds que les citoyens leur confient.
Cette démarche s’inscrit pleinement dans la prise de conscience actuelle, née de la crise de la Covid-19, de la nécessité de s’orienter davantage vers une consommation raisonnée. L’heure n’est plus à l’exubérance mais la sobriété, consommer moins tout en consommant mieux, en donnant la priorité à des produits bio, issus des circuits courts et de la production locale. Un changement de comportement que les banques se doivent d’accompagner, notamment en finançant davantage l’économie locale et les commerces de proximité, permettant ainsi de participer activement au développement de nos territoires et des emplois en région. Car la transition écologique ne pourra pas se faire sans justice sociale voire sans justice climatique. Le financement d’une économie plus responsable et plus positive constitue en effet une opportunité de lutter davantage contre les inégalités sociales ainsi que de soutenir les populations et les entreprises qui pourraient être fragilisées par cette mutation écologique. Sur ce terrain également, les banques ont une sérieuse carte à jouer !