Francis Hallé, botaniste a lancé une initiative en faveur de la création d’une forêt primaire en Europe occidentale. Son court livre résume l’importance des arbres, des forêts. Il dénonce la disparition de forêts naturelles en Europe occidentale au profit d’une activité forestière dévastatrice.
Francis Hallé est un botaniste émérite, reconnu, spécialiste des milieux naturels, en particulier des forêts tropicales. Il a impulsé la création en 2019 de l’association pour la réalisation d’une forêt primaire en Europe occidentale. Le projet vise la création d’une forêt de 70 000 hectares surface minimum selon Gilbert Cochet surface, nécessaire à la vie des grands mammifères, herbivores et leurs prédateurs.
Le projet est ambitieux, car il faudrait gommer pendant six à dix siècles les effets de l’activité humaine sur toutes les forêts européennes, exceptée la dernière forêt primaire de notre continent, qui se trouve en Pologne.
La forêt primaire s’étendrait sur une surface représentant l’équivalent d’un carré de 25 kilomètres sur 25 kilomètres, ce qui n’est pas considérable. Cette superficie pourrait être trouvée en France, à cheval sur des pays frontaliers, Espagne, Italie Suisse, Allemagne, Belgique. C’est du côté du Haut-Jura franco-suisse que la piste la plus sérieuse pourrait être explorée.
Des obstacles et des contradictions
Le chemin du projet n’est pas exempt d’obstacles. Bien des forêts sont le cadre d’activité humaines parfois denses : agriculture, pastoralisme, foresterie, randonnée et tourisme en toutes saisons. Le projet n’évoque pas non plus la question des habitants, des constructions, des infrastructures, appelées à disparaitre. Une forêt entièrement naturelle suppose l’élimination de ces arte fact.
Le projet n’est pas exempt de contradiction. IL prévoit en effet de rendre la forêt visitable, grâce à des sentiers aménagés au dessus du sol. Mais c’est oublier que la fréquentation même limitée entraine des dérangements de la faune.
Autour de la forêt protégée serait créée une zone pare feu. En bordure de la foret seraient aménagées des infrastructures lourdes pour l’hébergement de touristes, et une « structure immobilière discrète pour l’hébergement d’expositions . Les terrains ne seraient pas achetés, mais resteraient propriété des pays, des Etats, mais aussi on le suppose des communes. Or, les communes, souvent des communes forestières attendent de la forêt des revenus.
La principale contradiction de ce projet est claire. Il s’agir de laisser la nature faire, en renonçant à l’anthropomorphisme. Mais paradoxalement, Francis Hallé annonce que la tâche sera lourde, puisque des dizaines de générations d’équipes se relaieront pour travailler dur afin de laisser faire la nature.
Il existe peut-être des solutions plus simple. De multiplier ici et là des forêts sauvages, plus petites, connectées à des forêts moins sauvages, afin d’éviter une concentration inévitable de touristes. Des forêts en évolution naturelle, certes de moindre ampleur peuvent être décidées, ici ou dans nos parcs nationaux créés pour cela, et dans nos quelque 56 parcs naturels régionaux. Une solution peut aussi consister à relier des forêts par des corridors forestiers.
Pour une forêt primaire en Europe occidentale, Francis Hallé, Editions Actes Sud, 64 pages, 8 euros.