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Massif des Ecrins : le changement climatique bouleverse l’alpinisme

Presque tous les itinéraires d’alpinisme dans le massif des Écrins sont bouleversés avec le changement climatique depuis 1975 date de parution du livre de l’alpiniste Gaston Rébuffat « Les 100 plus belles des Écrins ». C’est ce que montre un  travail de documentation et de cartographie mené par Parc national  des Ecrins pendant l’été 2023.
      Le site du Parc National des Ecrins mentionne une étude réalisée par Mathis Arnaud, étudiant à l’Université Savoie-Mont-Blanc et aspirant-guide de haute montagne, Enviscope publiant un résumé de ce texte.  stage fait suite aux travaux déjà menés dans le massif du Mont-Blanc et dans le Valais, explique Richard Bonet, chef du service scientifique au Parc national. L’idée et la méthode sont les mêmes, comparer les courses les plus réputées du massif au moment de la parution des « 100 plus belles  courses dans les Ecrins » avec ce qu’on a aujourd’hui.

     Sur les 100 courses du livre, les 70 itinéraires les plus fréquentés et réputés ont été retenus, avec une répartition homogène entre parcours rocheux, en neige et mixtes. Pour qualifier et quantifier les évolutions depuis 50 ans, Mathis Arnaud  s’est entretenu avec des guides et des scientifiques, avant de croiser images aériennes et cartes topographiques anciennes et actuelles.

Ces travaux ont permis de classer les 70 itinéraires de 0 à 4 en fonction des modifications subies depuis 1975 : augmentation des difficultés techniques, plus grande exposition aux dangers objectifs( chutes de pierre, chute de séracs, avalanches, coulées, etc)  ou changement de saisonnalité pour des conditions optimales d’ascension) :

  • Niveau 0 : itinéraires non impactés par les effets du changement climatique.
  • Niveau 1 : itinéraires peu impactés, dont seulement une courte portion est affectée par des changements géomorphologiques ou glaciologiques qui n’augmentent pas significativement les dangers objectifs ou la difficulté technique.
  • Niveau 2 : itinéraires modérément affectés ; les conditions optimales pour réaliser les ascensions sont plus rares et la difficulté technique et/ou l’exposition aux dangers objectifs sont plus importantes.
  • Niveau 3 : itinéraires très impactés dont l’ascension est impossible en période estivale.
  • Niveau 4 : itinéraires disparus en raison du changement climatique.

Presque toutes les courses affectées

Les résultats sont clairs : quasiment toutes les courses d’alpinisme des Ecrins  ont subi des modifications, quant aux risques objectifs, la période optimale ou les pratiques. Pour Mathis Arnaud   »  Les trois processus qui affectent le plus grand nombre d’itinéraires sont le retrait glaciaire, des glaciers plus raides et des glaciers déneigés plus tôt en saison estivale. Ils concernent respectivement 97, 91 et 91 % des itinéraires. 

-2 itinéraires n’ont pas évolué (niveau 0, 3 % des itinéraires), de type rocheux […],

-30 itinéraires ont peu évolué (niveau 1, 43 % de itinéraires),

-22 ont modérément évolué (niveau 2, 31 % des itinéraires )

-16 ne sont plus fréquentables en été (niveau 3, 23 % des itinéraire).

– 0 de niveau 4 : aucun n’a complètement disparu.

Surtout les courses difficiles

Les courses les plus impactées sont surtout celles d’une difficulté supérieure à difficile (D), les itinéraires mixtes et les couloirs en neige. C’est le cas du couloir Chaud aux Trois Dents du Pelvoux (3682 m), « toujours en conditions » pour Rébuffat en 1975, mais praticable seulement entre la fin de l’automne et le printemps aujourd’hui, ou du couloir nord des Bans, qui alternait neige et glace il y a 50 ans mais qui n’est plus qu’un couloir rocheux instable .

Le retrait ou la fonte de la neige, plus tôt dans la saison (ou parfois permanente) des couvertures glacio-nivales, par exemple des névés, sur lesquels la progression est plus aisée. La fonte des névés contraint à avancer dans des pierriers, des blocs, etc. Affectant 61 % des itinéraires documentés, le retrait touche principalement les approches et les descentes, accentuant leur difficulté et/ou les risques. C’est  le cas de la traversée du Pelvoux par le couloir Coolidge, affecté par une fonte prématurée accroissant les risques de chutes de pierres, ou de la descente de la Meije, jadis  facilitée par les névés, effectuée aujourd’hui dans les rochers.

Ces changements ont des répercussions sur la pratique de l’alpinisme, en premier lieu sur la saisonnalité des courses. Certains itinéraires n’étant plus réalisables l’été ( glaciers découverts, crevassés, pentes plus raides en rocher à la place de névés ou de glaciers) , la fréquentation se reporte en hiver après  le retour de la neige; ou au printemps, avant la fonte de cette dernière. Pour certaines courses neigeuses, privilégiées pour l’initiation à l’alpinisme en 1975,  la fréquentation est largement en baisse. La cause est la fonte des calottes glaciaires et l’augmentation des risques de chutes de pierres ou de séracs. Cette fréquentation qui concerne principalement les couloirs et le ski de pente raide reste très marginale.

es effets du changement climatique ont parfois des effets positifs sur certains parcours, comme la disparition du risque de chutes de séracs dans la voie normale des Rouies. La disparition du glacier  permet d’accéder à l’arête des Cinéastes sans crampons. S’adapter aux bouleversements qui touchent la haute montagne est aujourd’hui un passage obligé pour les guides et les alpinistes amateurs. Dans ce contexte, « les dispositifs comme Refuges sentinelles sont essentiels, rappelle Richard Bonet. Ils permettent de discuter avec les professionnels de la montagne de ces évolutions, des adaptations et parfois des transitions à mener. »

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