Une étude sur la méthanisation menée par l’Inrae conclut à des impacts environnementaux majoritairement bénéfiques ou neutres. L’étude compare les impacts de deux scénarios, l’un avec méthanisation et l’autre sans, dans différents contextes agricoles orientés vers la polyculture ou vers l’élevage. L’étude répond à des questions du rapport de la mission d’information sénatoriale publié cet automne.

En France, la méthanisation pourrait être un des principaux leviers pour un mix de gaz 100 % renouvelable dans les réseaux en 2050. Le développement de la filière intégrant l’injection de biométhane dans les réseaux gaziers, repose surtout sur la méthanisation d’intrants agricoles : résidus de cultures, effluents d’élevage et les cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive). Ces substrats pourraient assurer 50 à 75 % de la production de gaz renouvelable.

333 unités de méthanisation injectaient du biométhane dans les réseaux gaziers au 1^er novembre 2021, pour une capacité de production de 5 833 GWh/an⁽¹⁾. La croissance de cette production repose sur la capacité à mobiliser des ressources suffisantes pour la méthanisation. En additionnant l’ensemble des ressources mobilisables, l’Ademe a estimé qu’il serait techniquement possible de produire 60 TWh de biométhane en 2030 et 123 TWh en 2050 soit 25 % de la consommation actuelle.

Analyse de cycle de vie de la méthanisation agricole

Reposant sur une analyse du cycle de vie (ACV), l’étude présente un bilan environnemental global de la méthanisation agricole en intégrant ses trois fonctions : production d’énergie, gestion d’effluents et fertilisation des sols. Les résultats avec méthanisation sont comparés au bilan d’un système sans méthanisation, équivalent en termes de fonctions et de services. Un système sans méthanisation inclut l’utilisation du gaz naturel (fossile), l’emploi d’engrais industriels traditionnels (origine non renouvelable) et une gestion classique des effluents sur l’exploitation agricole (épandage simple).

Les 16 indicateurs ACV utilisés sont les suivants : changement climatique, destruction de la couche d’ozone, formation d’ozone photochimique, émissions de particules fines, acidification des sols, eutrophisation terrestre, épuisement des ressources énergétiques (fossiles et nucléaires), radiations ionisantes, toxicité humaine avec effets cancérigènes et non cancérigènes, eutrophisation de l’eau douce, eutrophisation marine, écotoxicité pour les eaux douces, occupation des terres, épuisement des ressources en eau, épuisement des ressources métalliques et minérales.

Pour 7 indicateurs le scénario « méthanisation » donne de meilleures performances dans un scénario « culture » et pour 9 indicateurs dans un scénario « élevage », notamment une amélioration de 60 à 85 % pour le changement climatique, l’épuisement des ressources énergétiques, et la destruction de la couche d’ozone. Pour 5 indicateurs, les écarts ne sont pas significatifs.

Les performances sont en retrait sur plusieurs indicateurs (notamment radiations ionisantes, épuisement des ressources métalliques et minérales pour les deux scénarios, et eutrophisation des eaux douces pour le scénario « culture »), ce qui s’explique notamment par un recours accru à l’énergie électrique, nécessaire au procédé de méthanisation. À noter que l’analyse détaillée des résultats montre que la qualité des eaux n’est pas dégradée localement.

Le potentiel des Cive

Au-delà de l’utilisation des résidus de cultures végétales un des principaux enjeux d’un scénario de développement de la méthanisation repose sur le potentiel de mobilisation des Cive, semées en période d’interculture entre deux cultures principales. Les Cive étudiées ici (mélange de céréales immatures : triticale, seigle et avoine, résistants au gel et pouvant être conduites sans pesticide) répondent à des objectifs complémentaires de services écosystémiques, étendus à des critères agro-environnementaux : recyclage des éléments minéraux en cas de restitution de digestats, couverture des sols et piège à nitrates, stockage potentiellement additionnel de matière organique et de carbone dans les sols apporté par les racines, les chaumes et par le retour au sol des digestats.

Le développement des Cive dépend de l’évolution des pratiques agricoles et des conditions climatiques futures, en particulier pour ce qui concerne la gestion des ressources en eau en cas de besoin d’irrigation. Ces nouvelles pratiques associées aux besoins techniques et économiques de la production de biométhane doivent rester compatibles avec le maintien de la production alimentaire. Dans cette perspective, la méthanisation pourrait être un levier permettant aux agriculteurs d’adopter des nouvelles pratiques en cohérence avec la transition agroécologique et énergétique.

^{[1] https://opendata.reseaux-energies.fr/explore/dataset/points-dinjection-de-biomethane-en-france}

Référence : Esnouf A., Brockmann D., Cresson R. (2021) Analyse du cycle de vie du biométhane issu de ressources agricoles – Rapport d’ACV. INRAE Transfert, 168pp.

A conulter : un dossier méthanisation sur le site de l’Inrae

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