Des moustiques « double mutants », porteurs de deux gènes de résistance aux deux classes d’insecticides les plus utilisées dans le monde, ont été étudiés à Montpellier, par des chercheurs du CNRS et de l’Institut de recherche sur le Développement (1) Dans un article publié en ligne dans BioMed Central, les chercheurs montrent que ces mutations interagissent et augmentent le taux de survie des moustiques en absence d’insecticide. Ces travaux devront être pris en compte dans les stratégies de lutte contre les moustiques vecteurs de maladies.
Les équipes du CNRS et de l’IRD s’intéressent aux mécanismes qui permettent aux insectes de résister aux insecticides. Le plus souvent, la mutation génétique qui permet aux insectes de résister aux insecticides s’accompagne pour eux d’un “fardeau” génétique. Les insectes résistants sont plutôt “handicapés” pour le reste de leur capacités : survie, fécondité, échappement à la prédation. Quand ils se retrouvent dans un environnement sans insecticide, ces moustiques se reproduisent beaucoup moins bien que les insectes n’ayant pas muté.
Pas de fardeau génétique
Jusqu’ici, ce fardeau était considéré comme un allié pour l’homme dans sa lutte contre les insectes transmetteurs de maladie. Les stratégies mises au point pour lutter contre les moustiques exploitent jusqu’à présent à tour de rôle la vulnérabilité des moustiques « sensibles », en présence d’insecticides, et les fragilités des moustiques « handicapés », en absence d’insecticides. Les stratégies alternent habituellement deux sortes d’insecticides pour agir sur tous les moustiques.
Les chercheurs ont comparé le taux de survie d’une lignée de moustiques portant les deux gènes de résistance à deux classes d’insecticides les plus utilisées dans le monde à chacune des lignées résistantes à une seule classe d’insecticide. Ils ont montré que les « doubles mutants » ne sont pas doublement « handicapés ». Au contraire le fardeau génétique des doubles mutants diminue. Les moustiques double mutants sont résistants en présence des deux classes d’insecticides. Et ils vivent très bien dans un milieu sans insecticide.
Désormais les stratégies utilisant deux insecticides ne pourront plus être utilisées et d’autres stratégies de lutte contre les moustiques devront être mises au point.
1 Institut des Sciences de l’Evolution, (CNRS/Université Montpellier 2, Montpellier), Laboratoire de Lutte contre les Insectes Nuisibles (IRD, Montpellier) et Laboratoire Génétique et évolution des maladies infectieuses (CNRS/IRD).