En Rhône-Alpes, les cinquante Plans de Prévention des Risques Technologiques (PPRT) destinés à mieux prendre en compte les risques surtout autour des usines, sont presque tous lancés. Le dernier a été créé pour le lancement du PPRT du stockage de gaz d’ETREZ dans l’Ain, le 30 juin, peu après la mise en place du CLIC du stockage souterrain de TOTAL à Viriat (Ain). Enfin.
Huit ans après la loi dite « Bachelot » adoptée en 2003, ces procédures très lourdes ont été mises sur les rails, mais tous les PPRT ne sont pas achevés, encore moins arrêtés officiellement. Il faut dire que les Plans sont une gageure technique, mais aussi financière.Ils sont ambitieux techniquement, demandent du temps, et coûtent potentiellement cher!
C’est sans doute le montant de la facture qui explique la lenteur avec laquelle sortent les PPRT. Il y a quelques années déjà le prix de certains plans était exhorbitant. Contraintes de payer des dizaines de millions d’euros en dehors de leurs propres investissements ( pour cofinancer la mise aux normes d’habitations) certaines entreprises peuvent réellement se poser la question de la relocalisation de leurs activités.
La barre placée assez haut
Deux ans après la catastrophe AZF, la loi Bachelot place la barre très haut, à la hauteur des émotions provoquées par le drame de TOULOUSE. La loi prévoit de doter les sites pouvant générer le plus de risques, de plan rigoureux. La loi lance un pari ambitieux pour les services de l’Etat, pour les entreprises, comme pour les collectivités territoriales. « Il s’agit d’une loi qui protège non seulement les riverains, mais qui protège aussi les établissements industriels en leur permettant de fonctionner dans des conditions de sécurité et d’acceptabilité accrues » explique Jean-Jacques Guillot, délégué régional de l’Union des Industries Chimiques.
– La première étape de la mise en place des Plans de Prévention des Risques Technologiques est la création, pour chaque site concerné, d’un Comité Local d’Information et de Concertation (CLIC). Presque tous les Comités locaux ont été mis en place.
– La deuxième étape est le lancement du choix du périmètre sur lequel des études seront lancées. Presque tous les PPRT ont franchi cette étape, depuis deux ans.
– La troisième étape est un arrêté préfectoral qui prescrit le lancement de l’élaboration d’un Plan de Prévention des Risques Technologiques. En Rhône-Alpes, tous les PPRT devraient être prescrits à al fin de 2011. Ne sont pas encore prescrits trois PPRT dans l’AIN, dont deux pour des stockages souterrains de gaz.
Etudes: la parole aux spécialistes
La quatrième étape est une phase d’études , destinées à évaluer les risques, c’est à dire les effets de tel ou tel type d’accident. La parole est aux spécialistes qui passent en revue tous les scénarios, et calculent les effets maximum prévisibles dans une série de phénomènes. Les risques sont de plusieurs ordres : une explosion entraine une surpression, qui peut provoquer des dégats aux biens, mais aussi aux personnes. Il faut calculer les conséquences.
En cas d’émanation toxique, il faut prendre en compte des conditions météoroligiques les plus fréquentes, ou les pires, pour maximiser les risques. Il faut évidemment ne pas raisonner seulement d’une manière abstraite, mais sur le terrain, en tenant compte de la configuration des lieux, des installations.
Une carte des aléas est tracé pour chaque plan avec une zonage précis:
– zone 1 : zone de dangers très graves pour la vie humaine
• zone 2 : zone de dangers graves pour la vie humaine
• zone 3 : zone de dangers significatifs pour la vie humaine
• zone 4 : zone de dangers indirects pour la vie humaine par explosion des vitres
Une dimension temporelle
Pour chaque risque les zones sont délimitées dans le site et autour du site. Mais le risque n’est pas seulement spatial. Il a une dimension temporelle. En fonction de la rapidité d’un phénomène, les mesures à prendre ne sont pas les mêmes. L’évacuation des personnes peut, ou doit être plus ou moins rapide.
– La carte des enjeux permet de tracer les enjeux et les conséquences sur les constructions, les équipements, les activités sociales. Elles vont de la démolition à des modifications, en tenant compte des risques. Dans certaines zones aucun renforcement n’est nécessaire. Il faut prendre en compte non seulement les habitations, mais aussi les équipements publics, les stades, piscines, établissements recevant du public. Il ne faut pas oublier tout un tissu d’entreprises locales, artisans, sous traitants qui ont édifié au fil des ans des installations qui sont souvent loin de répondre aux normes de résistance à plusieurs types de risques.
La diversité des impacts montre que l’élaboration est délicate. Car c’est tout un tissu social qui risque d’être déchiré: habitants contraints de vendre, de déménager, entreprises fragilisées, communes contraintes à supprimer des équipements, à réaliser des investissements très lourds.
Stratégie: le prix des plans
Vient ensuite une étape où les enjeux sont discutés par des POA. Des groupes de travail réunissant Etat, entreprises, associations, collectivités, se rendent sur le terrain et examinent concrètement les répercussions des effets. C’est le moment où les coûts sont calculés. Et où on se rend compte que l’addition est souvent salée, pour les entreprises, pour l’Etat, pour les collectivités et pour les particuliers.
La phase de stratégie du Plan de Prévention des Risques, est le moment des arbitrages, et des controverses. On confronte les modèles, les simulations, on regarde sur le terrain les effets possibles de tel ou tel accident. Les visites de terrain et les échanges permettent d’adapter et de trouver des solutions.
Les entreprises sont en mesure de recourir à de nouvelles technologies. Des investissements dans de nouveaux équipements réduisent les risques, dont les coûts que les entreprises devraient prendre en charge. C’est le cas dans l’usine Arkema,de Jarrie ( Isère) où le changement de technique va réduire l’impact environnemental, donc les mesures à prendre dans le cadre du futur PPRT.
La phase de concertation qui aboutit à un projet finalisé est longue. En tous les cas peu de PPRT en Rhône-Alpes ont franchi cette étape : sept sur cinquante !
Or, certains PPRT concernent des sites très importants, et portent une charge symbolique importante, comme celui de la raffinerie Total de Feyzin où un incendie avait fait 18 morts en janvier 1966. Le préfet du Rhône a promis que le projet de PPRT pour le site serait mis en œuvre en 2012. Une fois un accord technique trouvé entre services de l’Etat entreprises, représentants des collectivités et des habitants, le projet de Plan doit être soumis à une enquête publique. Ce qui explique que seulement quatre PPRT soient approuvés par arrêté préfectoral.