Une nouvelle étude réalisée sur les 69 espèces de poissons d’eau douce du territoire métropolitain révèle que 15 d’entre elles sont menacées de disparition. L’état des lieux a porté sur 69 espèces parmi les 95 espèces recensées en métropole. Conformément à la méthodologie de l’UICN, 26 espèces n’ont pas été soumises à l’évaluation et ont été classées en catégorie “Non Applicable” : cette situation concerne toutes les espèces non natives introduites dans la période dite récente (après 1500). C’est le cas du Silure glane, introduit en Alsace en 1857, ou encore de l’Omble de fontaine, introduit en métropole au siècle dernier.
L’état des lieux a été élaboré par le Comité français de l’Union International de Conservation de la Nature ( UICN) et le Muséum national d’Histoire naturelle, en partenariat avec la Société française d’ichtyologie et l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques. La dégradation et la destruction des milieux naturels constituent encore la principale menace pour les poissons d’eau douce. L’extraction de granulats entraîne la destruction des habitats pour des espèces comme la Lamproie de rivière, classée dans la catégorie “Vulnérable”, ou la Sofie, “Quasi menacée”, présente dans le Rhône, qui privilégient les cours d’eau à galets ou à graviers pour leur reproduction.
Assèchement des zones humides
L’assèchement et le curage hivernal des zones humides altèrent l’habitat naturel de la Loche d’étang, classée “En danger”, et le drainage agricole des prairies humides réduit les périodes de crues, modifiant ainsi les conditions favorables à la reproduction du Brochet, classé “Vulnérable”. La qualité de nombreux milieux naturels d’eau douce est également altérée par la pollution, à laquelle les poissons sont souvent très sensibles. L’Anguille européenne est exposée à de nombreux polluants et pesticides qui fragilisent ses défenses immunitaires. Le Chabot du Lez est sensible aux polluants chimiques d’origine agricole qui affectent sa fécondité. Ces deux espèces sont classées “En danger critique d’extinction”. Le changement climatique pourrait aggraver les conditions de vie de nombreuses espèces.
Migrateurs en danger
La situation des poissons migrateurs amphihalins est très préoccupante. A l’exception de la Lamproie marine, “Quasi menacée”, toutes ces espèces se trouvent menacées. Les poissons amphihalins effectuent une partie de leur cycle de vie en rivière et une autre partie en mer. La plupart des espèces sont perturbées par les barrages qui compromettent leur périple migratoire vers les zones de reproduction. C’est le cas par exemple du Saumon atlantique, de la Lamproie de rivière, de l’Esturgeon européen et de l’Anguille européenne, menacée par le braconnage. L’Esturgeon européen dont la pêche est strictement interdite, a disparu depuis longtemps du Rhône. L’espèce demeure victime de captures accidentelles, liées en particulier au chalutage en mer. Esturgeon et Saumon sont classés “En danger critique d’extinction”.
En raison d’un manque de connaissances ou de changements survenus dans la dénomination scientifique de certaines espèces, près d’un tiers des poissons d’eau douce (22 espèces sur les 69 évaluées) ont dû être placés dans la catégorie “Données insuffisantes”. La récente scission du Goujon en quatre espèces (Goujon, Goujon de l’Adour, Goujon occitan et Goujon d’Auvergne) explique l’absence d’informations sur la répartition et l’abondance actuelles de chacune des quatre nouvelles entités.
Des mesures réglementaires ont été prises. Certaines espèces bénéficient d’importants efforts de restauration, comme le Saumon atlantique, dont la situation mobilise de nombreuses associations, ou l’Apron du Rhône et l’Esturgeon européen, qui font tous deux l’objet d’un plan spécifique de conservation.
michel.deprost@enviscope.com avec le communiqué du Muséum National d’HIstoire Naturelle
