La coopérative RailCoop devrait être liquidée le 29 avril ( 1) . Ce sera le dernier chapitre de ce que les promoteurs eux-mêmes ont trop appelé une aventure. Abuser de ce terme même, c’est trop gommer ce qu’aurait du être le projet, un véritable projet économique, environnemental, territorial.
Le projet Rail Coop a été mis sur les rails à partir d’un constat, d’une » envie » de train, d’un désir d’aménager , de désenclaver des territoires. Mais un projet ne se construit pas sur des envies, ni sur les envies de ses promoteurs aussi compétents soient-ils, ni sur l’envie d’interlocuteurs conquis d’avance.
Certes, RailCoop a séduit des collectivités, des intercommunalités, des associations, des sociétaires, qui ont mis au total plusieurs millions d’euros. Mais pour un projet ferroviaires hautement capitalistique d’emblée ( achat de matériels roulants, rénovation, études diverses lourdes équipe de salariés) la collecte de fonds ne suffit pas.
Certes des régions non impliquées géographiquement ont apporté un soutien, mais ce soutien était davantage symbolique, politique, que financier, voire technique.
L’absence de soutien des deux régions Nouvelle Aquitaine et Auvergne Rhône-Alpes a été plus lourde de conséquences, éventuellement plus surprenante. En effet les Régions ont des compétences , non seulement réglementaires, mais aussi humaines et techniques. Elles ont en charge les transports de voyageurs régionaux. Elles connaissent les enjeux, les difficultés. Elles ne manquent pas non plus de souligner les insuffisances de la SNCF. Elles doivent ( obligation européenne) penser l’ouverture des marchés régionaux à la concurrence.
Mais on le sait, les Régions ne coopèrent pas en matière ferroviaire, d’où les difficultés des liaisons régionales aux » frontières » : difficultés pour Grenoble-Veynes-Gap, pour Lyon-Oyonnax Saint Claude, pour la rive droite du Rhône, pour le Cévenol et pour l’Aubrac.
Comment le projet RailCoop a-t-il été présenté aux deux Régions , ensemble, avec quelle préparation du terrain, avec quel programme, quel engagement de coopération, technique, quelles propositions financières? On l’ignore. Quelles ont été les réponses des Régions, quelles négociations ont été menées?
De même avec les Départements traversés, les communautés d’agglomération, les communautés de communes, les chambres consulaires, etc…Il a été fait mention d’une étude de marché solide, lors de la conférence de presse, mais cette étude n’a jamais été présentée.
De même, aucun compte d’exploitation prévisionnel, aucun bilan prévisionnel n’a été présenté , pour des années d’exploitation de la liaison Bordeaux- Lyon envisagée: recettes ( nombre d’abonnements, billetterie, etc) et charges, etc.
En raison de l’ambition du projet, il aurait fallu se rapprocher d’experts du ferroviaires, de l’expérience forte, développée dans un pays comme la Suisse fortement décentralisée et efficace sur le plan ferroviaire…
Les liens concrets avec les territoires ont sans doute été insuffisants, comme la présentation de la future offre, restée trop abstraite. Pour faire préférer le train, il aurait fallu expliquer à la clientèle potentielle, comment elle pouvait envisager, non seulement des Lyon-Bordeaux, mais aussi des voyages vers Montluçon, Limoges, Périgueux.
Il reste à saluer le courage et l’engagement des équipes de RailCoop, en espérant un rebond pour la ligne Bordeaux-Lyon.
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1 ) Michel Deprost a été sociétaire de RailCoop.