La ville de Saint-Etienne (175 000 habitants) devient officiellement la troisième ville de la Loire a signé la charte “Zéro pesticide” proposée par la FRAPNA après les communes de Mably (Roannais) et Planfoy (Pilat) (1). L’aboutissement d’une démarche de plusieurs années: en 2005, les cantonniers et jardiniers de la ville , revêtus parfois d’inquiétants scaphandres étanches, avaient répandu 400 litres de désherbant concentré sur l’espace public stéphanois. Or on sait que 30% de ce volume, lessivé par les pluies, partait aux égouts puis dans le Furan , la rivière qui traverse la ville, et enfin dans la Loire . Une quantité suffisante, selon les propos même de M.Dendalet, le directeur des espaces verts stéphanois, pour polluer le fleuve sur 200 à 300 kilomètres! Car il faut savoir que les stations d’épuration n’ont aucun effet sur les pesticides dissous dans les eaux. Selon les normes en vigueur ces 400 litres de pesticides étaient suffisant pour rendre impropre à toute consommation l’équivalent de 18 millions de m3 d’eau !
Et des études réalisées en 2006 ont révélé que 96 % des cours d’eau et 61% des eaux souterraines en France sont polluées par au moins un pesticide de synthèse, qui contaminent aussi l’air que nous respirons, nos aliments et les sols, pour finir par s’accumuler dans le corps des êtres vivants avec des conséquences désastreuses pour la santé humaine et animale. Dans les villes, les plus exposés aux pesticides répandus dans les espaces verts sont ainsi les petits enfants et les animaux de compagnie, car ils respirent plus près du sol que les adultes. Quant à la faune sauvage, 80% des populations d’hirondelles et presque 100 % des populations de moineaux ont aujourd’hui disparus des villes où ils prospéraient jadis, la principale cause avérée de ces disparitions étant l’empoisonnement par les pesticides dont la France est un des premiers “consommateurs” dans le monde.
Nouvelles pratiques, nouvelle communication
D’où l’idée de gérer de manière différente les espaces publics afin de réduire l’usage des produits phytosanitaires. C’est ainsi que la FRAPNA-Loire a proposé à la municipalité stéphanoise d’adhérer à sa charte “zéro pesticide”. La démarche en est simple : en partenariat avec le centre de formation professionnelle et de promotion agricole de Villars-Montravel (lycée professionnel agricole spécialisé dans l’horticulture), l’association propose aux communes qui s’engagent dans l’abandon progressif des pesticides un accompagnement technique et de communication. Le CFPPA de Montravel forme les personnels municipaux à de nouvelles techniques propres d’entretien des espaces verts, et la FRAPNA assure la communication autour de l’opération avec sensibilisation des scolaires et du grand public: diffusion de brochures, exposition, panneaux explicatifs, sorties animées “à la rencontre des herbes folles”, conférences sur le jardinage biologique …
A partir de 2007-2008 les 250 employés de terrain du service des espaces verts stéphanois, dont 110 jardiniers municipaux, ont pratiquement tous été formés progressivement aux risques sanitaires des pesticides et aux techniques d’entretien sans phytosanitaires: désherbage thermique, mécanique ou manuel, entretien des zones plantées par paillage et plantes couvre-sol, végétalisation des dessous d’arbres d’alignement, mise en place d’allées sablées plus faciles à entretenir mécaniquement…Et aujourd’hui pratiquement plus aucun pesticide d’est répandu dans l’espace public, à l’exception toutefois des cimetières où l’opinion publique exige encore un aspect , et donc un désherbage, impeccable. Mais les choses évoluent là aussi et les responsables des espaces verts travaillent là aussi à faire évoluer les mentalités.
Nouveaux parcs urbains et jardins ouvriers
La signature de la charte “zéro pesticide” par la municipalité stéphanoise intervient au moment où elle aménage aussi quatre nouveaux espaces verts de grande dimension, afin de renforcer l’image verte de la ville: parc urbain de la Plaine Achille créé sur une dizaine d’ha à l’emplacement du parking du parc des expositions, jardin public de la Place Carnot, Parc urbain entourant sur une vingtaine d’ha le musée de la mine du Puits Couriot , qui vient d’être classé monument historique, et enfin Parc péri-urbain de 3 ha au Valfuret. Ceux-ci ont été conçu (choix des aménagements et des essences végétales) en fonction du zéro pesticide.
Reste un enjeu majeur : les jardiniers amateurs qui utilisent à eux seuls quatre fois plus de pesticides que les collectivités. Une problématique particulièrement importante à Saint-Etienne où sont encore en activité dans la ville , gérés aujourd’hui par des associations de jardiniers amateurs , plus de 3000 “jardins ouvriers” nés avec l’industrialisation du bassin stéphanois. Pour eux l’adoption par la municipalité du “zéro pesticide” devrait avoir valeur d’exemple et entrainer à terme pour eux aussi une diminution sensible de l’usage des phytosanitaires.
(1) La quatrième collectivité de la Loire à s’engager dans la charte Zéro pesticide sera la communauté de commune de Balbigny dont quatre communes (Saint-Jodard, Epercieux-Saint-Paul, Saint-Marcel-de-Félines et Sainte-Colombe-sur-Gand) signeront officiellement le document le 8 avril 2011.