L’ouverture de transports régionaux de voyageurs à la concurrence est marquée par une approche très administrative découpant les marchés une mosaïque de lots qui risque de ne pas être attractive pour les exploitants.
La préparation de l’ouverture du marché de transports voyageurs par le train peut faire peur. L’exécutif d’Auvergne Rhône-Alpes a décidé d’avancer au pas sur une voie aussi peu sûre que certaines section du réseau ferroviaire. La concurrence n’est pas magique à tout les coups.
D’abord, il a fallu rappeler lors des débats, que le réseau ferroviaire, comme le réseau gazier ou comme le réseau de transport d’électricité est une sorte de monopole naturel. Il serait absurde de multiplier des réseaux ferrés concurrents. Mais un monopole naturel, détenu par l’Etat, suppose que ce dernier maintienne le bien de la nation en bon état, le gère en bon père de famille, avec le souci du long terme, de la qualité, de la sécurité, de l’environnement. Laurent Wauquiez a même soupçonné la SNCF de majorer les coûts de modernisation de ligne, ou de simple remise en état, pour brandir le signal route du refus de financer des travaux…Il manque apparemment d’une expertise indépendante pour certifier ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. On se trouve face à une entreprise publique juge et partie, face à un Etat dépourvu de compétences techniques ferroviaires.
Les conseillers régionaux de fait plutôt unanimes ont considéré que l’Etat a failli et manque toujours à l’appel. Ils ont été nombreux à déplorer que la SNCF ne soit plus un service public , faute d’avoir convaincu de préférer le train…
Mais la manière d’ouvrir le marché est-elle la bonne? Plusieurs critiques ont été soulevées qu’on retrouvera par ailleurs. Un commentaire seul peut suffire à décrire l’insuffisance de l’analyse de départ. Or l’analyse de départ, me semble biaisée. On a conservé pour ouvrir le marché, une vision , celle du découpage administratif du pays en » grandes régions », sensées représenter des marchés potentiels pour des exploitants.
Certes , le découpage imposé par le haut par M. François Hollande, a permis d’éviter que l’Alsace et ses deux départements, ouvre son propre marché régional. On a éviter l’absurdité d’un marché de la Haute Normandie et d’un marché de la Basse Normandie… Ouf.
Mais le découpage régional retenu est-il viable, sachant que des Régions vont elles-mêmes découpé , ciseau, tels des enfants appliqués des lots aux contours laborieux. On aura donc au mieux ou plutôt au pire pour Auvergne Rhône-Alpes, cinq lots ,gérés séparément, les lots de certains opérateurs pouvant être imbriqués entre les lots d’autres opérateurs. Le lot » Auvergne » et le lot » Transfrontalier' » pouvant être séparés autant qu’imbriqués par le lot » Etoile lyonnaise ».
Espérons qu’une logique économique et la force des choses permettront des répartitions intelligentes et cohérente des lots, pour pas arriver à la mosaïque de gestion du train naissant qui prévalait au milieu du 19 ème siècle. Il serait évidemment souhaitable que l’efficacité économique, gage de la qualité du service, des investissements, de la décarbonation, reprenne ses droits à l’échelle inter-régionale, pour la gestion de liaisons de longues distances non desservies par la société nationale.
On peut donc se demander si a solution optimale n’aurait pas du passer par une démarche ascendante des Régions travaillant ensemble d’emblée avec une vision interrégionale, de manière à faire émerger une offre de marchés suffisamment larges profitable, faciles à gérer, capables d’introduire en même temps l’ouverture régionale attendue.
Les Régions du Sud-Est , AuRA et PACA n’auraient-elles pas pu s’associer pour mettre en avant un schéma couvrant le quart de la France, permettant une offre nouvelle sur l’axe du Rhône, pour la traversée du Massif Central et pour la traversée des Alpes. Le découpage en cinq ou six grands réseaux ferroviaires interrégionaux aurait permis une meilleure prise en charge des lignes ( dites petites) des confins, tellement en souffrance. Cette coopération interrégionale aurait pu trouver sa place dans une conférence de régions, comme c’est le cas en Suisse occidentale.
Elle pourrait même aboutir à la mise en place de régies interrégionales, voire de sociétés interrégionales de chemins de fer, capables d’assurer un engagement durable en faveur de transports ferroviaires décentralisés…
Il n’est pas impossible qu’une logique moins administrative, moins juridique, fasse évoluer une approche apparemment régionale, qui reste très dictée d’en haut….