Pourquoi cette mobilisation en faveur des transports durables ?
Les stations de sport d’hiver seront parmi les plus rapidement touchées par le changement climatique. Il se passe un phénomène qui était annoncé. Pour Les Gets la saison 2006-2007 a connu un recul de près de 40% de l’activité des remontées mécaniques. On a pris conscience il y a seulement quelques années que le tourisme , le tourisme alpin aussi, était un gros consommateur de transport routier, que la consommation pour le loisir est plus importante parfois que les trajets domicile travail.
Or nous devons réagir nous organiser pour que notre activité soit durable, pour que nous puissions continuer à proposer du plaisir au public.
Les principaux obstacles pour un transport durable ?
Depuis le développement du ski, il y a un demi-siècle, on n’a compté que sur la route et sur l’autoroute. La voie ferrée qui arrive à Cluses et continue vers Saint-Gervais n’a qu’une voie, et le fait qu’elle accueille le TGV n’a rien changé. Les trains qui arrivent doivent repartir,ont du mal à en croiser d’autres, les capacités sont limitées. Et depuis Cluses nous n’avons qu’une route à deux voies. On ne peut pas l’élargir , il y a d’un côté la montagne, de l’autre la rivière. Et puis il y a le problème ici même, dans la commune. Chaque place de stationnement consomme cinq mètres carrés et une voiture nécessite trois places de stationnement, une devant l’hébergement, une devant un commerce, une près des remontées mécaniques. Nous avons dû construire des places de parkings, nous en construirons encore mais en saison, on compte 1000 voitures garées sauvagement. Quelles sont les solutions ?
Il faut d’abord lancer une desserte cadencée en car depuis Cluses, et ne pas se contenter d’un car pour chaque arrivée de train. En France, nous avons une culture qui sépare les bus urbains, et les cars, l’urbain et l’interurbain. Il faut avoir une vision globale. Il faut en finir avec les transports dédiés, qui transportent les écoliers, le public, les colonies.
Comme nous l’avons vu en Suisse, un car doit pouvoir prendre tout le monde et sur ce plan il faut faire évoluer les réglementations. Il faut aussi une meilleure connaissance de l’offre de transport par le public, ce qui a été fait avec les centrales de transports mises en place dans les Aravis et dans le Haut Chablais, sous forme d’un site Internet sur l’offre de transports collectifs.
Et pour le train ?
On ne parvient pas en France à imaginer qu’il faudrait investir pour mettre une voie ferrée à deux fois deux voies alors que les vallées ont connu un développement extraordinaire.
D’autres pistes ?
Il faudra aussi que les élus prennent des décisions courageuses, arrêtent de subventionner le goudron, pour financer l’organisation des transports. C’est ce qui a été fait à Arosa, en Suisse, où le public s’est reporté massivement sur le train : 15% des touristes viennent en train aux Gets, et la proportion ne change par alors qu’ils sont 50% à Arosa. C’est cette politique qu’avaient choisie il y a deux ans les conseillers généraux de l’Isère, politique qui a été remise en cause, mais il faudra avoir le courage de consacrer davantage à l’organisation, moins à l’asphalte. Nous pouvons le faire en Haute-Savoie où nos routes sont en bon état et ou l’entretien et l’amélioration ont comme effet d’accroître le trafic .
Les choix doivent être réalisés différemment ?
L’Etat n’est sans doute pas conscient des difficultés graves des stations de montagne. On gère en améliorant les problèmes au coup par coup. Le département devrait aller plus loin dans la gestion de la politique des transports interurbains qui est de sa compétence. Il faut revoir la délégation de service public, pourquoi pas imaginer une régie, faire évoluer les transporteurs privés, imaginer pourquoi pas une contribution de chaque habitant pour ce service de base. Il en va de l’avenir du tourisme en montagne.
Recueilli par Michel Deprost michel.deprost@enviscope.com