Deux semaines après le blocage de deux barres de combustibles lors du déchargement du réacteur 2 de la centrale de Tricastin, EDF est confronté à un épineux problèmes technique. La Réseau Sortir du Nucléaire interroge les autorités sur les mesures alors que l’Autorité de Sûreté Nucléaire surveille de près la situation.
Depuis le 8 septembre, les responsables de la centrale nucléaire de Tricastin sont confrontés à un problème technique délicat et rare: le blocage de deux barres de combustibles dans les internes supérieures. Deux semaines après l’incident, l’incident n’a pas de solution et EDF cherche le moyen de régler le problème.
La chronologie des faits est la suivante. Le 8 septembre, au cours d’une opération de renouvellement du combustible du réacteur, 2 de Tricastin, le couvercle a été soulevé. Ont normalement été soulevés aussi « les « internes supérieurs », des équipements qui permettent de manipuler les barres de combustibles. Deux assemblages de combustible sont restés accrochés. Ces deux assemblages sont encore accrochés. Les ingénieurs d’EDF n’ont pas encore établi la manière dont les assemblages sont se sont accrochés accidentellement. Les explications sont multiples.
Eviter la réaction en chaine
La situation actuellement est la suivante. L’Autorité de Sûreté a demandé à EDF de procéder l’évacuation des personnels du bâtiment réacteur où ne se trouvent que les personnes appelées à intervenir. « Nous avons fait vérifier l’étanchéité de l’enceinte de confinement, explique Charles Antoine Louet, responsable de la délégation de l’Autorité de Sûreté pour Rhône-Alpes Auvergne. Le bâtiment est en dépression pour éviter le rejet éventuel de gaz radioactif. Nous avons demandé à l’INstitut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire de réaliser des contrôles, notamment sur le béton”‘.
La cuve du réacteur est immergée, comme c’est le cas dans toute opération de déchargement, sous de l’eau chargée de bore: l’eau constitue une barrière contre les radiations alors que le bore absorbe les neutrons afin de prévenir toute réaction. Enfin, les éléments de combustibles sont enfermés dans des gaines, qui elles-mêmes constituent une troisième barrière, au plus près des pastilles de combustible.
Risque en cas de chute
La situation est très délicate. « Les deux assemblages, pesant chacun environ 800kg, menacent à chaque instant de tomber. Ils pourraient alors se briser et les différents morceaux, se glissant entre les autres assemblages, pourraient éventuellement déclencher une réaction nucléaire incontrôlée. Un très grave accident nucléaire serait alors possible. Mais, même sans une telle réaction, les opérations de nettoyage pourraient être quasi impossibles à réaliser, le réacteur pourrait être définitivement condamné et légué tel quel à nos descendants» estime le Réseau Sortir du Nucléaire.
Charles Antoine Louet, reconnaît qu’une chute risquerait d’endommager les gaines de combustibles, mais estime que les deux barrières de l’eau et de l’enceinte de confinement suffisent à empêcher une réaction et à éviter le rejet d’éléments radioactifs dans le milieu extérieur.
Un événement de ce type s’est déjà produit, rappelle le Réseau Sortir du Nucléaire, en 1999 à la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine (Aube). Il avait duré plus d’un mois, mais estime l’association, « la situation au Tricastin est encore plus grave car il s’agit de deux assemblages au lieu d’un seul, ce qui démultiplie les difficultés : les opérations engagées pour récupérer un assemblage peuvent provoquer la chute du second. De plus, alors que EDF et les autorités restent muettes sur ce sujet, il est fort possible qu’un assemblage ou même les deux soient “moxés“, c’est à dire contiennent du plutonium, ce qui aggraverait alors nettement les risques »
Assemblages d’uranium seul, ou moxés?
Le Réseau “Sortir du nucléaire” exige de toute urgence les réponses. Il demande si les deux assemblages sont-ils “moxés” ? Autrement dit, s’agit-il de combustible uranium-plutonium ou “seulement” d’uranium. S’il s’agit de mox, EDF reconnaît-elle que le risque de réaction incontrôlée est encore plus grand ? ». Le Réseau demande si les deux assemblages sont toujours dans l’eau de la cuve. « Selon certaines informations, après une tentative d’intervention, EDF ne parviendrait plus à positionner les deux assemblages sous l’eau. Dans ce cas, comment sont-ils refroidis ? ».
Le Réseau “Sortir du nucléaire” a écrit ce lundi à EDF, à l’Autorité de sûreté (ASN), à MM Sarkozy et Fillon pour obtenir « la vérité sur la gravité de la situation ». « Selon certaines informations, la situation dans la centrale serait si problématique que l’évacuation de plusieurs communes proches serait envisagée par les autorités ». Le réseau associatif demande s’il en faut « pas immédiatement évacuer les communes proches, voire les départements concernés, de façon préventive et non suite à une éventuelle aggravation de la situation ? » Le délégué de l’Autorité de Sûreté estime qu’aucune évacuation n’est nécessaire.
Plus généralement, l’association demande « à quelles dates sont prévues les prochaines ouvertures de cuve au Tricastin (ou fonctionnent trois autres réacteurs) et dans les autres centrales en France ? Quelles mesures sont mises en œuvre pour éviter qu’une situation identique ne se produise ? »
Michel.deprost@free.fr
Pour en savoir plus sur l’Autorité de Sûreté: http://www.asn.fr/
Pour en Savoir plus sur le Réseau Sortir du Nucléaire: http://www.sortirdunucleaire.org/